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Une action en hommage à Zouhair Yahyaoui
18 juillet 2014, par jectk79

Mon amie ne sait pas rediger un com sur un article. Du coup il voulais souligner par ce commentaire qu’il est ravi du contenu de ce blog internet.


Pourquoi aller tracer partout pour faire établir des évaluations de d’assurances familiales alors qu’existent des portails tels que Sherpa-mutuelle.fr proposant de rapprocher les propositions avec un comparateur mutuelle sophistiqué en restant votre demeure ? site => mutuelle obligatoire


Abderrazek Bourguiba condamné à 25 mois de prison
15 novembre 2011, par Bourguiba

je vous remercie
bourguiba abderrazak



Quelques points marquant contre l’environnement en Tunisie
6 novembre 2011, par xZNRpEkXvbSPvAf

I like to party, not look articles up online. You made it hpaepn.



Et puis y a eu la Révolution :)
1er novembre 2011, par liliopatra

On est mardi 1er novembre 2011, déjà neuf mois que ben ali s’est enfui et il est caché, comme un rat, en Arabie Saudite. Son collègue Gaddafi a été tué.
Après la lecture de cette lettre, tout cela parait être comme un cauchemar pour celles et ceux qui ne l’ont pas vécu personnellement. Cependant, le mal a sévi longtemps, beaucoup trop longtemps en Tunisie. Il est temps que ça change.
Tout un système policier qui s’effondre, la justice vient de renaître, certes encore fragile mais sera équitable insh’Allah.



Va chialer ailleurs ( reponse)
30 octobre 2011, par Maud

Oui il a un fils qui est mon meilleur ami et croyez moi, même si son père et loin de lui sa ne fait pas de lui un mauvais père il s’occupe très bien de lui et Selim va le voir de temps en temps. Je suis au cœur de cette affaire et je peux donc savoir les ressentis de chacun...



Va chialer ailleurs ( reponse)
30 octobre 2011, par Maud

ةcoutez quand on ne connait pas la personne on ne juge pas ! Je connais personnellement Monsieur Tebourski et je sais que c’est un homme bon, et je pense que si il a demander a rester en France c’est surtout pour son Fils !
Ne le jugez pas car vous ne le connaissez pas comme je le connais ! Je suis la meilleure amie de son fils Selim. Je sais qu’Adel est un homme bon alors arrêtez tous vos blabla et essayer donc de comprendre le fond de la chose. Merci et bonne soirée



> Une pétition de 86 prisonniers tunisiens
30 octobre 2011, par Moussa

the death of an African giant

Par : Y. Mérabet
En outre, contrairement à ce que pensent aujourd’hui de nombreux libyens, la chute de Kadhafi profite à tout le monde sauf à eux. Car, dans une Afrique où les pays de la zone subsaharienne riche en ressources minérales tournaient complètement le dos à la France pour aller vers la Chine, il fallait bien que monsieur Sarkozy trouve un autre terrain fertile pour son pays. La France n’arrive plus à vendre ses produits manufacturés ou de décrocher un marché en Afrique, elle risque de devenir un PSD C’est pour cela que l’on a vu une France prête à tout pour renverser ou assassiner Kadhafi ; surtout quand l’on sait que la Libye est l’une des premières réserves en Hydrocarbures d’Afrique et de Sebha est la capitale mondiale du trafic Franco-libyen de concentré d’uranium Nigérien. Egalement, l’on sait que jusqu’ici, les populations libyennes n’avaient rien à envier aux Français, ils vivaient richement mieux sans se suer. Puisque Kadhafi faisait tout son possible pour les mettre à l’abri du besoin. Il est donc temps pour les libyens de choisir pleinement futur partenaire occidental. Car si en cinquante ans de coopération la France n’a pu rien apporter à l’Afrique subsaharienne. Vat-elle apporter maintenant aux libyens un bonheur supérieur à celui que leur donnait leur Guide. Rien à offrir à ces ignorants de libyens, sauf des repas communs dans les poubelles de la ville Paris, en France c’est déjà la famine ? Lui, qui durant plusieurs décennies était l’un des faiseurs d’hommes les plus efficaces sur le continent Africain. De son existence, Kadhafi était le leader le plus généreux d’Afrique. Pas un seul pays africain ne peut nier aujourd’hui n’avoir jamais gouté un seul pétro –Dinar du guide Libyen. Aveuglement, et motivé par son projet des Etats-Unis d’Afrique, Kadhafi de son existence a partagé l’argent du pétrole libyen avec de nombreux pays africains, qu’ils soient Francophones, Anglophones ou Lusophones. Au sein même de l’union Africaine, le roi des rois d’Afrique s’était presque érigé en un bailleur de fond très généreux. Jusqu’à l’heure actuelle, il existe sur le continent de nombreux présidents qui ont été portés au pouvoir par Kadhafi. Mais, curieusement, même pas un seul de ces élèves de Kadhafi n’a jusqu’ici eu le courage de lui rendre le moindre hommage.Au lendemain du vote de la résolution 1973 du conseil de sécurité de l’ONU, certains pays membres de l’union africaine sous l’impulsion de Jacob Zuma ont tenté d’apporter un léger soutien au guide libyen. Un soutien qui finalement s’est éteint totalement sans que l’on ne sache pourquoi. Même l’union africaine qui au départ conditionnait avec amertume la prise du pouvoir libyen par un groupe de terroristes et la reconnaissance du CNT libyen constitués de traitres, s’est finalement rétracté de façon inexplicable. Et curieusement, jusqu’aujourd’hui, aucun gouvernement consensuel n’a été formé en Libye. Depuis l’annonce de l’assassinat de Mouammar Kadhafi, cette union africaine dont Mouammar Kadhafi était pourtant l’un des principaux défenseurs et ayant assuré le dernier mandat, n’a encore délivré aucun message officiel de condoléance à ses proches ou de regret. Egalement, même ceux qui hier tentaient de le soutenir n’ont pas eu le moindre courage de lever leur petit doigt pour rendre hommage à leur mentor. Jusqu’à l’heure actuel, seul l’ancien archevêque sud-africain et prix Nobel de paix Desmond TUTU a regretté cet acte ignoble. Même le président Abdoulaye Wade que l’on sait pourtant proche des révoltés libyens n’a pas encore salué la mort de l’homme qu’il souhaitait tant. Le lendemain de sa mort, un vendredi pas un musulman n’a prié pour lui ?.. A ce jour, sur le continent Africain, seul l’homme de la rue et les medias ont le courage de parler de cette assassina crapuleux du guide libyen. Mais, cette attitude des dirigeants africains ne surprend personne, dans la mesure où l’on sait que chaque président a peur de se faire remarquer par un Nicolas Sarkozy qui est capable de tout si la tête d’un président africain ou d’un arabe l’énerve.
Conclusion La Libye et l’Afrique toute entière viennent de tourner une page d’or avec la perte de Mouammar .
Traitre et maudit que je sois, si j’étais un libyen ?

Journaliste indépendant (Algérian Society for International Relations)
119, Rue Didouche Mourad
Alger centre



Liberté pour le Docteur Sadok Chourou
29 octobre 2011, par Dr. Jamel Tazarki

J’ai écrit un livre qui mérite d’être lu :
TOUT EST POSSIBLE - L’AVENIR DE LA TUNISIE
Vous pouvez télécharger le livre sur mon site Internet :
http://www.go4tunisia.de
Dr. Jamel Tazarki
Allemagne



DECES D’OMAR CHLENDI
28 octobre 2011, par bourguiba

Ma mére Térésa oui notre mére je suis abderrazak bourguiba le frére de mon meilleur ami Farouk .
vous peut etre me connait mais je pense pas que nous avont eu l’occasion de vous voir .

je suis désolé pour ce qui a passé pour mon frére Farouk .
Omar etait un homme exeptionnel un vrai homme j’ai passé avec lui 6 mois dans le prison nous étions plus que deux fréres.

soyez fiére de Farouk
et que la paradi soit pour lui



Projet libéral pour une nouvelle monarchie démocratique et laïque en Tunisie
22 octobre 2011, par Victor Escroignard

La Monarchie Constitutionnelle est l’avenir est la garantie des droits et libertés pour la Tunisie, la Libye et toute l’Afrique du Nord. Le Roi est l’âme du peuple, Il est porteur du sentiment d’unité nationale et du patrimoine historique du peuple. LA MONARCHIE CONSTITUTIONNELLE EST LE PLUS SUR MOYEN POUR EVITER QU’UN PRESIDENT FINISSE UN JOUR EN DICTATEUR (voyez le cas du roi d’Espagne, sauveur des libertés après le Franquisme).



> Lotfi Hamdi, une Barbouze qui se voit ministrable
4 octobre 2011, par Anti Lotfi Hamdi

Bonjour Mesdames, Messieurs,

Je souhaite attirer votre attention sur le faite que ce Barbouze comme vous le dites, a retourné sa veste à l’instant où il s’est assuré du départ définitif du ZABA plus exactement le 18 Janvier 2011.

Mais encore ce dernier qui détient pas un seul titre comme auprès du RCD mais aussi faison parti de plusieurs association et surout la chambre Franco-Tunisienne de marseille ou il a volé récemment le portfolio pour se faire une nouvelle peau et une nouvelle virginité auprès de la Tunisie, avec un pseudo symposium tenue au pôle technologique sis à la Gazelle (Ariana).

Rappel du passé : Khaled Néji représentant de l’office de l’huile près du consulat générale de Tunisie à Marseille a été victime de sa (Stoufida).
Monsieur Kahled Néji a été limogé de son poste, radié de ses fonctions, décédés suite à une attaque cardiaque après avoir visité les prisons Tunisiennes

Je souhaite que cette personne n’intervienne plus sur le sol Tunisien afin de crée des réseaux encore pire qu’avant et revenir au pouvoir par la fenêtre.

Aidez moi à dire la vérité sur ce malheureux de la Sbikha (kairouan) qui fout la honte à son peuple.

Ce Virus, qui trompe sa femme sans scrupule ni honte. A trahit ce que nos ancêtres ont essayé de bâtir, bravour, fraternité dévouement, sincérité.

Il est et il sera toujours à l’antipode des Tunisiens , lèches botes et au plurielles

Vive la Tunisie sans hypocrites



Blog dédié à la défense du prisonnier politique Abderrahmane TLILI
4 octobre 2011, par bechim

bonjour je suis tres heureuse que mr tlili soit libere mais je n arrive pas avoir de nouvelles precises je tiens a dire que c est un MONSIEUR exceptionnel et qu il ne merite vraiment pas ce qu il a endure j aimerai pouvoir lui exprimer tte ma sympathie



> Tunisie, l’agression abjecte sur Samia Abbou par les voyous de Ben Ali
26 septembre 2011, par Liliopatra

Voilà quatre ans se sont écoulés et votre combat a porté ses fruits. J’aurais pas osé signer ces quelques mots par mon nom réel si vous n’avez pas milité pour ’ma’ liberté. Reconnaissante et le mot ne peut résumer ce que je ressens et tout le respect que je vous porte.

Merci...

Lilia Weslaty



> Les procès de l’ignorance et les progrés de l’Homme
24 septembre 2011, par a posteriori, l’auteur Nino Mucci

Les petits cons s’amusent à faire leurs graffitis imbéciles même sur les statues couvertes de prestige et d’histoire de Carthage ; on en a maintenant fini avec Ben Ali, avec la censure et l’étouffement des idées et de coeur opéré par son régime. Mais on en finira jamais avec l’idiotie des fondamentalistes islamiques qui promenent leurs femmes en burka, parce que c’est la seule façon par laquelle savent voir une femme : comme une bête dangeureuse. On en finira pas facilement, terrible dictature, avec ceux qui demandent maintenant de couper les mains, les jambes et les bras, suivant l’obsolète loi coranique, sans se faire aucun souci de l’Homme. Jésus, le Christ en est le plus grand champion, le Rédempteur de l’humanité, Lui qui a porté la Croix pour nous TOUS ; quant à la mafia et à al-Capone, nous les plaçerons comme un héritage historique de cet islam que tant s’acharnent à défendre par l’ignorance (mafia vient de l’arabe dialectal anciene "mafiah", c’est-à-dire "protection", la mafia est nait et c’est culturellement radiquée dans une ancienne terre d’islam, la Sicile)



que dieu te glorifie.
23 août 2011, par adyl

j’ai aimé ce que vous pensé . suis de ton coté. tu me trouvera a l’appui



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par Rédaction de reveiltunisien.org
23 février 2005

Le Groupe de l’IFEX chargé de l’observation de la Tunisie (TMG) publie un rapport sur les conditions de sa participation au Sommet mondial sur la société de l’information, devant avoir lieu à Tunis en novembre 2005.

Le rapport est le fruit d’une mission d’enquête en Tunisie, qui a eu lieu du 14 au 19 janvier 2005 et à laquelle ont participé six membres de l’ةchange international de la liberté d’expression (IFEX), un réseau qui regroupe 64 groupes nationaux, régionaux et internationaux de défense de la liberté d’expression dans le monde.

L’objectif visé par le TMG était de faire campagne pour amener une amélioration sensible de l’état de la liberté d’expression en Tunisie, alors que le pays se prépare à accueillir la deuxième phase du Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) en novembre 2005.

Source

Février 2005

TABLE DES MATIبRES :

En bref p. 3

A. Antécédents et contexte p. 7

B. Faits sur le terrain p. 19

1. L’emprisonnement d’individus p. 19

2. Blocage de sites Web p. 23

3. Blocage de la diffusion de livres et de publications p. 28

4. Atteinte à la liberté d’association p. 33

5. Restrictions à la liberté de mouvement p. 41

6. Le manque de pluralisme dans la propriété des ondes p. 46

7. La censure de la presse p. 48

8. La torture p. 53

C. Conclusion p. 55

Recommandations p. 57

Annexe 1 - Lettre ouverte à Kofi Annan Annexe 2 - Liste des sites Web bloqués Annexe 3 - Liste des livres interdits

EN BREF

Le présent rapport est le fruit d’une mission d’enquête en Tunisie, qui a eu lieu du 14 au 19 janvier 2005 et à laquelle ont participé six membres de l’ةchange international de la liberté d’expression (IFEX), un réseau qui regroupe 64 groupes nationaux, régionaux et internationaux de défense de la liberté d’expression dans le monde.

L’objectif visé par le Groupe de l’IFEX chargé de l’observation de l’état de la liberté d’expression en Tunisie était de faire campagne pour amener une amélioration sensible de l’état de la liberté d’expression en Tunisie, alors que le pays se prépare à accueillir la deuxième phase du Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) en novembre 2005.

Parmi les délégués de la mission, on comptait des représentants du Comité des écrivains en prison du PEN international, de l’Union internationale des éditeurs, de l’Association mondiale des radiodiffuseurs communautaires, du Comité mondial pour la liberté de la presse, de l’Organisation égyptienne des droits de l’Homme et du Pen norvégien.

Ces six organisations font partie d’un groupe formé de treize membres de l’IFEX qui se sont associés en 2004 pour former le Groupe d’observation de l’état de la liberté d’expression en Tunisie (IFEX-TMG).

Les sept autres membres de l’IFEX-TMG sont : ARTICLE 19, Journalistes canadiens pour la liberté d’expression (CJFE) qui assure la gestion de l’IFEX, organisation basée à Toronto, le Centre for Human Rights and Democratic Studies (CEHURDES), Index on Censorship, Journalistes en Danger (JED), le Media Institute of Southern Africa (MISA), et l’Association mondiale des journaux (AMJ).

Les faits saillants révélés par la mission sont les suivants :

Les individus qui expriment ouvertement leurs opinions ou qui mènent des activités médiatiques sont susceptibles d’être emprisonnés ou harcelés.

Les sites Web, y compris les sites de nouvelles ou d’information, sont bloqués. La police surveille également les courriers électroniques et les cybercafés.

La diffusion de livres et de publications est bloquée.

La liberté d’association, incluant le droit des organisations de bénéficier d’un statut juridique et de tenir des assemblées, est entravée.

La liberté de circulation des défenseurs des droits de la personne et celle des dissidents politiques est restreinte. De plus, la police surveille et intimide ces individus, en plus d’intercepter leurs communications.

Il y a un manque flagrant de diversité en ce qui concerne la propriété des médias audio-visuels, puisque la seule radio « privée » et la seule chaîne de télévision privée sont considérées comme des fidèles supporteurs du président Ben Ali.

La presse est censurée et le contenu journalistique est uniforme.

Les services de sécurité ont recours à la torture, et ce en toute impunité.

Le Groupe de l’IFEX chargé de l’observation de l’état de la liberté d’expression en Tunisie recommande au gouvernement tunisien de :

Libérer Hamadi Jebali, rédacteur en chef de l’hebdomadaire Al Fajr, ainsi que des centaines d’autres prisonniers qui, comme lui, sont emprisonnés pour leurs convictions religieuses et politiques, et qui n’ont pourtant jamais prôné ou eu recours à la violence.

Mettre fin aux sanctions administratives arbitraires qui obligent le journaliste Abdellah Zouari à vivre à quelque 500 Km de sa femme et de ses enfants et garantir que ses droits fondamentaux à la liberté de déplacement et à la liberté d’expression soient respectés.

Libérer les sept dissidents connus sous le nom d’Internautes de Zarzis, condamnés après des procès injustes à de lourdes peines d’emprisonnement sous prétexte qu’ils auraient utilisé l’Internet pour commettre des attentats terroristes. Pendant les procès, aucune preuve de méfait n’a été présentée, selon les avocats des accusés et plusieurs groupes locaux et internationaux de défense des droits de la personne.

Mettre fin au harcèlement et aux attaques contre les activistes des droits de la personne et leurs familles et traduire en justice les individus responsables d’avoir commandité ou perpétré ces attaques.

Cesser le blocage de sites Web et la surveillance policière des cybercafés et des internautes

Autoriser la diffusion de livres interdits, mettre fin à la censure et se conformer aux normes internationales en matière de liberté d’expression

Agir contre l’intervention continue d’employés du gouvernement dans la vie privée des citoyens et cesser la confiscation leur courrier.

Lever les restrictions arbitraires imposées aux défenseurs des droits de la personne et aux activistes politiques, notamment Mokhtar Yahyaoui et Mohammed Nouri.

Prendre des mesures sérieuses pour lever toute restriction frappant la presse indépendante et encourager une réelle diversité dans le contenu et la propriété des médias.

Promouvoir un pluralisme authentique aussi bien dans le contenu que dans le système de propriété de la presse audio-visuelle et veiller à ce que la procédure d’octroi d’autorisations d’établir des chaînes de radio et de télévision soit à la fois juste et transparente.

Permettre la tenue d’enquêtes indépendantes dans certains cas de torture, dans lesquels on soupçonne l’implication de membres des forces de sécurité.

Se conformer aux normes internationales relatives à la liberté d’association et de réunion en accordant une reconnaissance juridique à certains groupes authentiques issus de la société civile, comme le CNLT, le Centre de Tunis pour l’Indépendance de la Justice, la Ligue des écrivains libres, l’OLPEC, ainsi que l’Association internationale de soutien aux prisonniers politiques, l’Association de la lutte contre la torture et le RAID-ATTAC Tunisie.

A. ANTةCةDENTS ET CONTEXTE

Antécédents de la mission

Le présent rapport est le fruit d’une mission d’enquête en Tunisie, qui a eu lieu du 14 au 19 janvier 2005 et à laquelle ont participé six membres de l’ةchange international de la liberté d’expression (IFEX), un réseau qui regroupe 64 groupes nationaux, régionaux et internationaux de défense de la liberté d’expression dans le monde.

Parmi les délégués de la mission, on comptait des représentants du Comité des écrivains en prison du PEN international, de l’Union internationale des éditeurs, de l’Association mondiale des radiodiffuseurs communautaires, du Comité mondial pour la liberté de la presse, de l’Organisation égyptienne des droits de l’homme et du Pen norvégien.

Ces six organisations font partie d’un groupe formé de treize membres de l’IFEX qui se sont associés en 2004 pour former le Groupe d’observation de l’état de la liberté d’expression en Tunisie (IFEX-TMG).

Les sept autres membres de l’IFEX-TMG sont : ARTICLE 19, Journalistes canadiens pour la liberté d’expression (CJFE) qui assure la gestion de l’IFEX, organisation basée à Toronto, le Centre for Human Rights and Democratic Studies (CEHURDES), Index on Censorship, Journalistes en Danger (JED), le Media Institute of Southern Africa (MISA), et l’Association mondiale des journaux (AMJ).

L’objectif visé par le Groupe de l’IFEX chargé de l’observation de l’état de la liberté d’expression en Tunisie était de faire campagne pour amener une amélioration sensible de la situation de la liberté d’expression en Tunisie, alors que le pays se prépare à accueillir la deuxième phase du Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) en novembre 2005.

Cette mission rassemblant plusieurs groupes de défense de la liberté d’expression, la première du genre depuis que la France a reconnu l’indépendance de la Tunisie en 1956, a eu lieu près de cinq ans après celle menée par M. Abid Hussain, Rapporteur spécial des Nations Unies sur la liberté d’expression et d’opinion dans ce pays.

Non seulement « l’uniformité de ton » et l’absence de critique du gouvernement continuent de caractériser les médias tunisiens, comme l’a d’ailleurs noté le Rapporteur spécial en février 2000, mais la législation traditionnellement employée pour exercer « différents types d’incitations et de pressions » sur les journalistes et les éditeurs a été amendée au cours des deux dernières années pour entraver de façon radicale la liberté d’expression.

Des Tunisiens de tendances politiques diverses, et parmi eux d’anciens ministres, reconnaissent que le Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) pourrait offrir une occasion précieuse pour informer la communauté internationale des attaques incessantes contre la liberté d’expression en Tunisie et faire campagne pour protéger cette liberté fondamentale, tant avant le SMSI qu’après la fin de ce sommet en novembre 2005.

Or plusieurs d’entre eux craignent que le gouvernement tunisien, qui investit des sommes considérables dans ses campagnes de relations publiques et dans certains groupes qu’il qualifie faussement d’ONG, pourrait utiliser le SMSI pour améliorer son image et camoufler son piètre registre en matière des droits de la personne.

Les chiffres officiels font état de l’existence de plus de huit mille organisations de la société civile, mais des sources fiables indiquent qu’il n’existerait qu’une douzaine de groupes réellement indépendants. La plupart de ces groupes ne sont pas reconnus par les autorités et les personnes qui les dirigent font l’objet, presque systématiquement, de surveillance policière et de harcèlement.

Au cours de cette mission de six jours, les membres de l’équipe de l’IFEX-TMG ont rencontré des écrivains, diffuseurs, éditeurs, journalistes, militants et universitaires tunisiens, ainsi que des collaborateurs des membres du gouvernement et des représentants d’agences et organisations financées par l’ةtat.

Pendant toute la durée de la mission, les membres de la délégation ont pu suivre les faits et gestes de la police en tenue civile, omniprésente, dont la tâche consiste principalement à surveiller et contrôler les déplacements des défenseurs des droits de la personne et des dissidents politiques, à les harceler et à talonner les enquêteurs et journalistes étrangers qui désirent en savoir plus.

En effet, l’un des membres de la mission d’enquête a déclaré à l’adresse d’officiels tunisiens que lors de plus de 200 voyages effectués au cours des dernières années dans les quatre coins du monde, jamais il n’avait été témoin d’une telle surveillance policière !

La plupart des rencontres ont eu lieu dans ou près de la capitale du pays, Tunis. Cependant, quatre membres de la délégation se sont aussi rendus par avion dans le sud-est de la Tunisie le 18 janvier, près de la frontière libyenne, pour y rencontrer Abdallah Zouari, journaliste et ex-prisonnier politique qui a reçu l’ordre, après sa libération, de vivre à quelque 500 Km de sa femme et de ses enfants dans un petit village reculé et sous une surveillance policière permanente.

Plus tard, ces membres de la mission ont réussi à rencontrer dans la ville méditerranéenne de Zarzis et sous l’oeil attentif de policiers en civil, les familles de sept jeunes personnes ayant écopé de lourdes peines carcérales pour avoir simplement navigué sur l’Internet, selon un groupe local de défense des droits de la personne.

Les autorités tunisiennes ont tenté, à plusieurs reprises, de retarder la mission sous différents prétextes avant d’organiser des rencontres entre les membres de la délégation et différents officiels du gouvernement, et de se déclarer prêtes à organiser d’autres avec des agences étatiques et des organisations financées par l’ةtat

Contexte politique

La Tunisie a été le premier pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord à se doter d’une Constitution, il y a presque 145 ans, en 1860. Sa société civile plutôt dynamique a joué un rôle important dans la mise à terme du protectorat français en 1956 et dans la promulgation, quelques mois plus tard, du Code de statut personnel qui accordait aux femmes tunisiennes des droits inégalés dans le monde arabe.

L’étendue des droits accordés aux femmes, ainsi que les efforts soutenus visant à promouvoir l’éducation et les soins de santé et à combattre la pauvreté sous le mandat du premier président Habib Bourguiba, ont donné l’impression, pendant près de quarante ans, que la Tunisie était l’un des pays arabes les plus susceptibles de se transformer en démocratie.

Or même si elles datent de plus de quarante-huit ans, ces réussites, plus particulièrement dans le domaine des droits des femmes, sont régulièrement citées par le gouvernement tunisien lorsque son piètre registre en matière de droits de la personne attire l’attention de la communauté internationale.

La mise sur pied de la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’Homme en 1977, la première en son genre en Afrique et dans le monde arabe, ainsi que l’émergence d’une presse indépendante durant la dernière décennie du long règne autocratique de Bourguiba, a suscité des espoirs chez les militants pour la Démocratie en Tunisie et ailleurs dans le monde arabe.

Bien des Tunisiens ont espéré que l’arrivée du général Zine El Abidine Ben Ali, qui a évincé Bourguiba lors d’un coup d’ةtat sans effusion de sang le 7 novembre 1987, conduirait le pays vers la démocratie.

La libération de centaines de prisonniers politiques, la ratification de traités internationaux de défense des droits de la personne, y compris la Convention contre la torture, et la tolérance éphémère du pluralisme politique et médiatique, ont été bien accueillies par les activistes politiques et des droits de la personne.

Malheureusement, ces espoirs furent anéantis lorsque le président Ben Ali a décidé d’utiliser la guerre civile algérienne qui sévissait tout près et qui avait débuté suite à l’annulation des résultats des élections législatives de janvier 1992, comme prétexte pour bafouer les droits fondamentaux des Tunisiens, et plus particulièrement celui de la liberté d’expression.

L’opposition et les journaux indépendants ont été réduits au silence et des journalistes, ainsi que des centaines d’activistes politiques, pour la plupart des islamistes, furent emprisonnés suite à des procès iniques, particulièrement au début des années 1990. La plupart d’entre de ces activistes politiques, notamment Hamadi Jebali, rédacteur en chef de l’hebdomadaire islamiste Al-Fajr (l’aube), purgent toujours de lourdes peines de prison.

Amnesty International a adopté la plupart de ces activistes comme prisonniers d’opinion et soutient sans relâche que leur emprisonnement découle uniquement de leur volonté « de vivre d’une manière pacifique selon leurs convictions religieuses et pacifiques. » Les individus et les membres influents du mouvement islamiste interdit ne furent pas les seules victimes de la politique de répression et d’injustice. Les leaders du Parti communiste des ouvriers tunisiens (PCOT), également interdit, du Mouvement des démocrates socialistes (MDS), ainsi que des syndicalistes membres de l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) ont également été emprisonnés de manière arbitraire au cours des dix dernières années.

Plus tard, le gouvernement tunisien profitait des attaques du 11 septembre 2001 contre les ةtats-Unis pour restreindre encore davantage les libertés d’association, de déplacement et d’expression, tout en claironnant son appui à la « guerre contre le terrorisme » déclarée par le président George W. Bush. Une nouvelle loi criminalisant la liberté d’expression a été votée à la fin de 2003, sous prétexte d’appuyer « les efforts internationaux pour lutter contre le terrorisme et le blanchiment d’argent. » La Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’homme (LTDH) a indiqué que suite à la promulgation de cette loi, « l’année 2003 fut marquée par l’adoption de lois qui portent très gravement atteinte au droit à l’information. »

La Constitution de 1959 a été révisée en 2002 suite à un référendum à la soviétique, qui a permis au Président Ben Ali de se présenter en octobre 2004 pour un quatrième mandat. Les modifications apportées à la Constitution annulaient les restrictions empêchant le chef de l’ةtat de se porter candidat à la présidence à plus de trois reprises, lui accordaient l’immunité à vie contre les poursuites judiciaires. Ces modifications législatives étaient camouflées parmi de très nombreux amendements ayant trait à la défense des droits de la personne.

Au cours des élections présidentielles de 1989, 1994 et 1999, le Président Ben Ali a été déclaré vainqueur des élections par le ministère de l’Intérieur par plus de 99 pour cent du vote. En octobre 2004, il a obtenu près de 95 pour cent des suffrages dans une élection qualifiée d’injuste et boycottée par les groupes d’opposants les plus crédibles. Seuls les dirigeants de cinq formations politiques dont l’audience à l’intérieur du pays est fort limitée et qui se partagent 20 pour cent des sièges à la Chambre des députés, largement dominée par le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) du président Ben Ali, peuvent se présenter aux élections présidentielles.

Il existe sept petites formations politiques reconnues par les autorités. Seuls les partis loyaux au président Ben Ali ont été admis à la Chambre des députés depuis 1994 et sont moins sujets au harcèlement.

Les élections sont fréquemment caractérisées par des irrégularités flagrantes, y compris l’intimidation des électeurs et une restriction radicale du droit d’expression et de tenir des réunions.

Obligations internationales et régionales

Le gouvernement tunisien se félicite d’adhérer aux obligations internationales en matière de respect des droits de la personne, surtout celles formulées par la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; la Convention relative aux droits de l’enfant ; la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes ; la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ; et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

La Tunisie adhère également au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, mais n’a pas ratifié les deux protocoles optionnels du Pacte. Le premier reconnaît le droit des individus de déposer des plaintes au Comité des droits de l’homme des Nations Unies et le second porte sur l’abolition de la peine de mort.

En 1982, la Tunisie a ratifié la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. L’Article 9 de cette charte, qui est davantage respectée dans l’Afrique sub-saharienne qu’en Tunisie ou dans les autres pays de l’Afrique du Nord, garantit que « toute personne a droit à l’information. »

Selon l’article 32 de la Constitution tunisienne, les conventions internationales dûment ratifiées prévalent sur la législation du pays.

De plus, l’accord d’association signé le 17 juillet 1995 par la Tunisie et l’Union européenne, les ةtats membres de l’Union européenne, qui est entré en vigueur le 1er mars 1998, comprend une clause qui concerne les droits de la personne.

L’Article 2 de l’accord d’association stipule clairement que les relations entre les parties, ainsi que les dispositions de l’accord lui-même, reposent sur le respect des droits de la personne et des principes démocratiques. Le préambule de l’accord souligne d’ailleurs que les deux parties valorisent et respectent les droits de la personne et les libertés politiques. En vertu de l’Article 74 de l’Accord de coopération en matière de culture, les deux parties se sont entendues pour mettre l’accent particulièrement sur les modes de communication et d’expression écrits, ce qui comprend les livres.

Législation interne

A. La Constitution

L’Article 8 de la Constitution du 1er juin 1959 stipule que « les libertés d’opinion, d’expression, de presse, de publication, de réunion et d’association sont garanties et exercées selon les conditions définies par la loi. » La Constitution stipule ainsi clairement l’autorisation législative de la restriction des droits fondamentaux, incluant le droit à la liberté d’expression.

La Constitution prévoit un pouvoir judiciaire indépendant et interdit les arrestations arbitraires, les détentions et l’ingérence arbitraire dans les affaires privées et la correspondance. Or l’autorité exécutive qui peut nommer, confirmer, promouvoir et transférer les juges exerce une grande influence sur leurs décisions, plus particulièrement dans les causes politiques.

De plus, le Président est à la tête du Conseil supérieur des juges et contrôle le Conseil constitutionnel, simple organe consultatif qui répond au Président et qui n’a pas le pouvoir d’invalider une loi. La plupart des membres du Conseil constitutionnel sont nommés par le Président et les citoyens tunisiens n’ont aucun moyen de contester une loi anti-constitutionnelle.

B. Le Code de la presse

L’Article 1 du Code de la presse adopté le 28 avril 1975 garantit, depuis son amendement en 1993, « la liberté de la presse, de l’édition, de l’impression, de la distribution et de la vente des livres et des publications. » Les dispositions générales de cette législation interdisant la « subversion » et la « diffamation » ont souvent servi à poursuivre les critiques du gouvernement et à encourager l’autocensure des Tunisiens.

L’Article 8 prévoit le dépôt légal de tout document produit ou reproduit en Tunisie. Dès la fin de la production ou de l’impression, il revient au producteur ou à l’imprimeur de procéder au dépôt légal de l’ouvrage. En ce qui concerne les livres et des publications imprimées autres que les périodiques, ceux-ci doivent être déposés en un exemplaire auprès du bureau du Procureur de la République concerné et en 7 exemplaires auprès du ministère de la Culture. De ces sept exemplaires, un ira à la Chambre des députés, un autre au ministère de l’Intérieur et quatre à la Bibliothèque nationale.

L’Article 12 prévoit que des amendes allant de 200 à 800 dinars tunisiens (1 $ U.S. correspond à environ 1,2 dinars tunisiens) puniront les contrevenants. De plus, l’article stipule que tout document publié ou importé en Tunisie et qui n’est pas conforme aux dispositions de la loi pourra être saisi, sur ordre du ministère de l’Intérieur.

Un décret de 1977 édicte les conditions générales de mise en oeuvre du Code de la presse de 1975. En ce qui concerne le dépôt légal, le décret stipule que le déposant (l’imprimeur, l’éditeur, le diffuseur ou le producteur) doit envoyer trois exemplaires d’un formulaire de dépôt timbré, signé (...) au bureau du dépôt légal. Le décret stipule par ailleurs que l’administration doit renvoyer au déposant l’une des trois copies du formulaire de dépôt, qui accompagnait le dépôt. Cette copie sert d’accusé de réception du dépôt.

Ne respectant pas ce cadre juridique, les autorités exigent des imprimeries qu’elles attendent l’approbation du ministère de l’Intérieur avant de procéder à la diffusion du livre (ou du journal) en question. Cette approbation prend la forme d’un récépissé, que les autorités n’envoient parfois jamais, ou qu’elles mettent beaucoup de temps à émettre.

Selon l’Article 13, une déclaration doit être déposée auprès du ministère de l’Intérieur avant la publication de tout périodique. En échange, le ministère de l’Intérieur doit produire un récépissé. La déclaration doit comprendre : le titre du périodique, les coordonnées du rédacteur en chef, celles de l’imprimeur, la langue dans laquelle le document a été rédigé... En vertu de l’Article 14, avant l’impression de tout périodique, l’imprimeur doit demander le récépissé émis par le ministère de l’Intérieur. En pratique, ce document n’est presque jamais émis, ce qui empêche la création d’un certain nombre de périodiques en Tunisie.

Le statut de la presse étrangère est également régi par le Code de la presse, aux articles 24 et 25. Ainsi, selon ces articles, la publication, l’introduction ou la diffusion en Tunisie d’ouvrages étrangers, qu’il s’agisse ou non de périodiques, peut être interdite en vertu d’une décision du ministère de l’Intérieur, si le secrétaire d’ةtat responsable de l’information pour le Premier Ministre en décide ainsi.

Dans son rapport de 2003 intitulé « Une presse en détresse, » la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH) explique comment le Code de la presse « a conservé son caractère essentiellement répressif » même après le transfert de plusieurs de ses articles au Code pénal. Ce transfert visait surtout à créer l’illusion d’une « libéralisation de la situation de la presse, » selon la LTDH. Selon son rapport de 2004 intitulé « Médias sous surveillance » et qui met en évidence la section du Code de la presse ajoutée en 2001 prévoyant des pénalités plus lourdes pour toute infraction liée à l’incitation au meurtre et au pillage, et ce même en l’absence d’actes concrets découlant d’une telle incitation.

Le Code de la presse a été amendé à trois reprises depuis 1988. Ces amendements concernaient essentiellement les dispositions liées à l’enregistrement des droits d’auteur.

Certains juristes tunisiens éminents soutiennent que la législation actuelle qui touche les médias brime davantage la liberté d’expression que les lois adoptées en 1936 sous le protectorat français et au moment de l’indépendance du pays en 1956.

C. Le Conseil supérieur de la communication

Le Président Ben Ali a remplacé le Conseil supérieur de l’information consultatif, qui offrait aux journalistes tunisien, durant le règne de son prédécesseur, un forum pour discuter avec les officiels et les éditeurs des questions d’intérêt et même de faire campagne en faveur d’un journalisme indépendant, par un organisme consultatif dont le pouvoir est amoindri. Le Conseil supérieur de la communication, mis sur pied le 30 janvier 1989, est un organisme consultatif composé de 15 membres. Il doit notamment étudier et proposer des mesures visant à aider au développement d’une politique générale des communications. Cependant, l’organisme ne reçoit pas de doléances émanant des professionnels ou du public.

D. Autres lois qui ont un impact direct sur la liberté d’expression :

a. La Loi sur les Associations du 7 novembre 1959 a été amendée à deux reprises : l’un des amendements permet d’interjeter appel de toute décision du ministère de l’Intérieur concernant la création ou la dissolution d’une association. Selon cette loi, une demande d’approbation, pour laquelle on émet un récépissé, doit être déposée auprès du bureau du gouverneur avant la création d’une association. En principe, le ministère de l’Intérieur dispose d’une période de trois mois pour refuser la demande de création d’une association.

b. Le code du travail de 1966 réglemente la création et l’opération d’organisations syndicales, qui ne requièrent aucune autorisation préalable.

c. Le code électoral du 8 avril 1969 a été amendé en 2003 pour interdire l’utilisation de télédiffuseurs privés étrangers pour appeler les citoyens à voter en faveur d’un candidat particulier ou d’une liste de candidats, ou pour encourager les citoyens à s’abstenir de voter. Toute infraction à cet amendement entraînerait une amende de 25 000 dinars tunisiens (soit près de 20 800 $ U.S.). Puisque cette interdiction ne touche ni le Président en fonction ni ses principaux conseillers, elle constitue surtout un désavantage pour les candidats de l’opposition lors des campagnes électorales.

d. La loi sur les partis politiques du 3 mai 1988 : les partis politiques ne sont pas autorisés ni à tenir des réunions, ni a publier des communiqués de presse, avant d’avoir reçu l’autorisation du ministère de l’Intérieur.

e. Le décret sur les télécommunications du 14 mars 1997 encadre la diffusion de l’Internet en Tunisie. Ce décret, qui fut suivi d’un autre décret huit jours plus tard, prévoit que le Code de la presse s’applique à la production, à la diffusion, à la distribution et à la conservation d’informations par le biais de moyens de télécommunication, y compris l’Internet.

Le décret concernant l’Internet impute aux fournisseurs d’accès la responsabilité du contenu des pages Web et des sites hébergés sur leurs serveurs. Les internautes et les personnes qui entretiennent des sites et des serveurs sont également tenus responsables de toute infraction à la loi (Article 9).

f. La loi sur le financement des partis politiques, adoptée le 21 juillet 1997, stipule que seuls les partis politiques représentés à la Chambre des députés ont le droit d’être subventionnés par l’ةtat.

g. La loi contre le terrorisme du 10 décembre 2003 visant à appuyer les efforts internationaux de lutte contre le terrorisme et contre le blanchiment d’argent, propose une définition très vague et générale du terrorisme.

Promulguée ironiquement à l’occasion de l’anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’Homme en 2003, cette loi a suscité de nombreuses inquiétudes parmi les groupes locaux et internationaux de défense des droits de la personne, car les gestes en faveur de la liberté d’expression et critiquant les politiques du président Ben Ali seraient considérés comme des « actes de terrorisme. » Bien avant la promulgation de cette loi, le gouvernement tunisien avait en effet déjà sa propre définition d’un « acte de terrorisme. » Des centaines de prisonniers d’opinion et d’activistes politiques en exil, qui n’ont jamais encouragé ou eu recours à la violence, sont ainsi catégorisés par les autorités comme des « terroristes. »

h. Le Code des télécommunications du 15 janvier 2004 réglemente l’utilisation des fréquences radio et les réseaux de communication privés. Une agence gouvernementale responsable de l’octroi des fréquences radio et de télévision, l’Agence nationale des fréquences, dont les activités sont supervisées par le ministère des Technologies de communication, a ainsi été établie.

Toute utilisation interdite de ces fréquences entraîne une peine d’emprisonnement comprise entre six mois et cinq ans, ainsi qu’une amende qui peut atteindre 20 000 dinars tunisiens (soit environ 17 000 $ U.S.).

i. La Loi sur la protection des renseignements personnels, adoptée par la Chambre des députés le 20 juillet 2004, a été présentée comme preuve de la soi-disant politique d’avant-garde du chef de l’ةtat dans le domaine des droits de la personne. Cette loi, en fait, pénalise sévèrement le transfert ou la publication par des individus de documents de l’ةtat jugés d’intérêt public. Cette loi permet également aux autorités publiques et locales, ainsi qu’aux entreprises publiques, d’avoir pleinement accès aux renseignements personnels des individus.

Cette loi prive les citoyens de toute forme de protection, encourage l’opacité et criminalise la transparence. Elle nie aux professionnels de l’information le droit d’enquêter et retire au public son droit à l’information, selon le Conseil National des Libertés en Tunisie (CNLT).

Le CNLT ajoute que cette loi est particulièrement intéressante, en ce qu’elle contrevient aux dispositions de la Convention contre la corruption, adoptée aux Nations Unies en décembre 2003 et ratifiée par la Tunisie en mars 2004.

La Convention contre la corruption stipule que tous les ةtats sont responsables de la prévention et de l’éradication de la corruption, et que ces derniers doivent coopérer les uns avec les autres, avec l’appui d’individus et de groupes extérieurs au secteur public, tels que la société civile, les organisations non gouvernementales et les organisations communautaire, pour faire en sorte que leurs efforts portent leurs fruits.

FAITS SUR LE TERRAIN

1. L’emprisonnement d’individus qui expriment leurs opinions ou qui entretiennent des activités médiatiques

- Hamadi Jebali, directeur de l’hebdomadaire islamiste Al Fajr ; emprisonné.

Jebali a d’abord été arrêté en janvier 1991 et condamné à Tunis devant un tribunal militaire à une peine d’emprisonnement d’un an pour « diffamation » après avoir publié un article de l’avocat Mohamed Nouri dans Al-Fajr sur l’inconstitutionnalité des tribunaux militaires en Tunisie. Il est demeuré en prison jusqu’en août 1992, lorsqu’il a été condamné à 16 années d’emprisonnement par un autre tribunal militaire à Tunis pour « appartenance à une organisation illégale » et pour « complot en vue de changer la nature de l’ةtat. » Plusieurs groupes humanitaires internationaux et diplomates occidentaux ont estimé injuste le procès de Jebali et de 170 autres membres du mouvement islamiste interdit An-Nahda.

Amnesty International a adopté Jebali et de nombreux autres islamistes emprisonnés en tant que prisonniers d’opinion et a affirmé à plusieurs reprises que ces individus n’avaient jamais prôné ou eu recours à la violence, et qu’ils avaient été emprisonnés uniquement en raison de leurs « opinions religieuses et politiques. »

La lourde peine de Jebali doit prendre fin en 2007.

- Les Internautes de Zarzis : Abderrazak Bourguiba, Hamza Mahroug, Abdel Ghafar Guiza, Ridha Belhaj Ibrahim, Omar Chelendi et Aymen Mcharek ; emprisonnés.

Mahroug, Giza, Belhaj Ibrahim et Mcharek ont tous été condamnés à 19 ans et 3 mois d’emprisonnement et à cinq années de contrôle administratif le 6 avril 2004 par le tribunal de première instance de Tunis. La plupart d’entre eux sont actuellement âgés de 21 ans. Un appel a permis de réduire leur peine à 13 ans. La Cour de cassation, le plus haut tribunal du pays, a par la suite confirmé la peine.

Bourguiba, qui est maintenant âgé de 20 ans, a été condamné le 16 avril 2004 par un tribunal pour mineurs à une peine de 25 mois de prison. Au moment de son arrestation, il était âgé de 17 ans.

Tahar Gmir et Ayoub Sfaxi, également impliqués dans cette affaire, ont été condamnés par contumace ; le premier à 19 ans et 3 mois, le second à 26 ans et 3 mois.

Les accusations sont les suivantes : constitution d’un gang dans le but de préparer et commettre des attaques contre des personnes et des biens ; préparation, transport et possession d’explosifs, de dispositifs et de matériels destinés à la fabrication d’engins explosifs ; vol ; tentative de vol et tenue de réunion non autorisées.

Les « preuves » supposément recueillies n’ont pas été présentées aux accusés, dont les dossiers n’ont jamais pu être consultés par leurs avocats.

Falsification des dates d’arrestation : les accusés ont été arrêtés à Tunis le 26 février 2003, si l’on en croit la version officielle. Or le bruit de leur arrestation courrait déjà le 18 février 2003. Le 19 février 2003, leurs avocats avaient déjà avisé le Procureur de la République au tribunal de première instance à Médenine de violations par la police des limites de la durée de détention préventive de leurs clients, ainsi que du fait qu’ils étaient détenus sans pouvoir communiquer avec l’extérieur.

Alors qu’ils ont été arrêtés les 5 et 8 février 2003 à Zarzis, dans le sud de la Tunisie, aucun rapport officiel ne rend compte des trois semaines qu’ils ont passées en isolement, avant la confirmation de leur arrestation.

Incompétence du tribunal pour des raisons territoriales : Lors d’une première audience le 3 février 2004 (soit une année entière après leur arrestation), la cause a été reportée au 2 mars 2004. Les avocats de la défense invoquaient l’incompétence du tribunal de Tunis, puisque l’arrestation des accusés avait eu lieu à Zarzis. Ils ont demandé la libération temporaire des accusés en raison de leur âge et du fait que leurs dossiers ne présentaient aucune preuve. Ces demandes ont toutes été rejetées.

En mars 2004, les avocats de la défense se sont retirés d’une audience pour protester contre le refus du magistrat de leur permettre d’obtenir des exemplaires des documents d’accusation. Les avocats ont considéré ce refus comme une violation des droits des accusés et du droit à un procès juste et équitable. Les détenus se sont abstenus de répondre aux questions du magistrat en l’absence de leurs avocats.

Les familles des détenus n’ont pu leur rendre visite avant mai 2003. Pour protester contre cette injustice, les familles des Internautes de Zarzis ont entrepris ensemble deux grèves de la faim en 2003. Leurs lettres aux autorités, visant à protéger leurs enfants de l’injustice, et particulièrement les lettres adressées au Président Ben Ali, sont demeurées sans réponse.

Alors que les familles espéraient que le Président Ben Ali répondrait à leurs demandes, la police a plutôt été envoyée sur place pour les harceler pendant leurs grèves de la faim. La police a également empêché les voisins et autres membres de la communauté d’exprimer ouvertement leur appui aux familles.

Pendant près de deux ans, les parents des accusés et leurs avocats ont, en vain, demandé qu’on leur présente des preuves tangibles des méfaits commis par les accusés. Le frère de l’un des prisonniers a d’ailleurs déclaré qu’une telle injustice flagrante pourrait un jour tenter certains Tunisiens, pacifiques et tolérants de nature, à avoir recours à la violence pour résister à la tyrannie.

Les Internautes de Zarzis étaient initialement emprisonnés dans une même prison à Tunis. Ceci permettait aux familles de visiter leurs enfants ensemble une fois par semaine et de partager les frais de déplacement. Or, leurs enfants ne sont plus emprisonnés au même endroit et les familles ne peuvent plus se permettre financièrement de rendre visite individuellement à leurs enfants une fois par semaine. Ces personnes sentent ainsi qu’elles sont punies collectivement.

Pendant ce temps, les parents et membres de la famille espèrent qu’un jour, leurs « enfants innocents seront de retour au foyer et que les vrais coupables seront traduits en justice. »

Certains groupes de la société civile considèrent que la libération des Internautes de Zarzis et la fin du cycle de harcèlement et d’injustice infligé à leurs familles constitue l’un des objectifs principaux de leur campagne en faveur de la défense des droits fondamentaux avant la tenue du SMSI à Tunis en novembre 2005.

Le comité récemment fondé qui vise à appuyer les Internautes de Zarzis (CSIZ) s’est réuni le 18 janvier au siége de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme à Tunis pour discuter de l’état de santé préoccupant des jeunes internautes emprisonnés. Les membres du comité ont récemment décidé de profiter de la tenue de la « Prepcom-2 » de Genève à la mi-février 2005 pour informer l’ensemble des participants de l’état critique des sept internautes emprisonnés.

Les membres ont également réitéré leur conviction qu’il est inacceptable, de quelque point de vue que ce soit, de tenir la seconde phase du SMSI à Tunis alors que sept internautes croupissent dans les prisons du régime tunisien.

Le CSIZ a indiqué que les sept internautes ne reçoivent pas les soins médicaux dont ils ont besoin et qu’ils sont exposés au mauvais traitement et au harcèlement des gardiens de prison. Selon le CSIZ, Abdel Ghafar Guiza aurait été systématiquement et odieusement torturé et harcelé pour des raisons racistes, à cause de la couleur de sa peau.

- Les jeunes de l’Ariana : Hichem Saadi, Kamel Ben Rejeb, Mahmoud Ayari, Anis Hdhili, Bilel Beldi, Riadh Louati, Kabil Naceri, Ali Kalai, Ahmed Kasri, Hassen Mraidi, Sabri Ounais, Sami Bouras ; emprisonnés.

Ces douze étudiants ont été arrêtés en février 2003 et condamnés par un tribunal tunisien à des peines d’emprisonnement comprises entre 4 et 16 années sous prétexte d’avoir créé une association dans le but de commettre des agressions et de semer la peur et la terreur.

Mohamed Walid Ennaifer a été condamné par contumace pour les mêmes accusations.

Selon certains avocats des droits de la personne, les jeunes étudiants ont été arrêtés près de la frontière algérienne, toute proche, planifiant soi-disant de quitter le pays et se rendre en Palestine.

Mokhtar Yahyaoui, l’un des juges tunisiens les plus respectés depuis l’indépendance, affirmait que cette cause était aussi peu fondée et fabriquée que la cause des Internautes de Zarzis. Il a ajouté que, selon lui, « ce qui est tragique dans ce pays, c’est qu’il n’existe pas de système judiciaire indépendant. ».

Le 5 janvier 2005, la Cour d’appel de Tunis a reporté la procédure. Le procès en appel a été reporté une autre fois au 23 février.

Les organisations locales des droits humains considèrent les jeunes de l’Ariana comme des prisonniers d’opinion et que l’affaire a trait à la liberté d’expression parce que l’un des faits retenus par la Cour contre l’un des jeunes prisonniers sont des documents téléchargés d’un site Internet.

Lors du procès, les accusés ont informé la Cour que tous leurs aveux ont été faits sous la torture.

- Jalel et Nejib Zoghlami ; emprisonnés.

Ces deux frères ont été accusés le 29 décembre 2004 à huit mois d’emprisonnement pour des accusations politiquement motivées de « vol, agression et dommages à la propriété d’autrui. » Selon certains groupes humanitaires, cette condamnation visait à réduire au silence Jahel Zohglami, activiste politique et éditeur d’un bulletin intitulé Kaws Al-Karama (l’arche de la dignité) et les autres membres de sa famille, connus pour leur opposition au règne autocratique du Président Ben Ali.

Jalel et Nejib Zoghlami sont les frères du journaliste Taoufik Ben Brik qui avait entrepris il y a cinq ans une longue grève de la faim pour défendre sa liberté de déplacement et d’expression.

La femme de Jalel, Ahlem Belhaj, est la Présidente de l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD). Plusieurs groupes humanitaires tunisiens des droits de la personne indiquent qu’elle a été harcelée et qu’on lui a refusé le droit de visiter, avec son fils, son mari emprisonné depuis septembre 2004.

2. Blocage de sites Web, incluant des sites de nouvelles et d’information, et surveillance policière des courriels et des cybercafés

Le Président Ben Ali a réitéré son engagement envers le développement de l’Internet alors que des sites Web étaient bloqués et que les jeunes internautes se voyaient harcelés, arrêtés, torturés et condamnés à de lourdes peines d’emprisonnement suite à des procès injustes.

Le gouvernement et les médias de l’ةtat claironnent haut et fort que l’accès à l’Internet est gratuit et qu’il va de soi que tout le monde puisse en profiter, sans mentionner le prix que doivent payer les internautes comme Zouhair Yahyaoui et les autres, qui tentent de consulter certains sites interdits ou qui critiquent le Président Ben Ali et son régime sur l’Internet.

Plus de Tunisiens ont été arrêtés pour s’être exprimés sur l’Internet au cours des trois dernières années, que pour des opinions émises dans les médias imprimés au cours des 48 dernières années. Le cas qui illustre le mieux ce manque de tolérance du gouvernement tunisien à l’égard de la liberté d’expression sur l’Internet est sans doute celui de Zouhair Yahyaoui.

Zouhair Yahyaoui a mis sur pied son magazine en ligne TuneZine (www.TuneZine.com), au cours de 2001 après avoir appris comment « accéder aux sites bloqués » afin d’étancher sa soif d’information et de communication. Ses problèmes ont débuté après juillet 2001 lorsqu’il a placé sur TuneZine une lettre ouverte adressée au Président Ben Ali signée par son oncle, le juge Mokhtar Yahyaoui. Dans cette lettre, que la poste a retournée à l’expéditeur sous prétexte que l’adresse était inconnue, et que les médias contrôlés par l’ةtat ont ignoré, le juge Yahyaoui dénonçait le manque d’indépendance du système judiciaire dans le pays.

Zouhair Yahyaoui a été arrêté le 4 juin 2002 dans un cybercafé de Tunis. Il a été faussement accusé de voler son « employeur, » le propriétaire du café Internet, alors qu’il était sans emploi à ce moment. Il a également été accusé de diffuser de fausses informations et a été condamné à 28 mois d’emprisonnement. Il a affirmé avoir été torturé. Il a par ailleurs indique que sa famille et son avocat n’ont pas eu le droit de lui rendre visite pendant son incarcération par la police. « J’ai été menotté et maltraité, et personne ne savait où j’étais pendant cinq jours, » a-t-il déclare.

Les cybercafés, connus en Tunisie sous le nom de publinets, font l’objet d’un contrôle serré de la part du ministère des Télécommunications et du ministère de l’Intérieur. L’accès à ces cybercafés publics peut être refusé par le propriétaire, qui est également autorisé à vérifier toute information sauvegardée sur un disque par un client. Il incombe au propriétaire de contacter la police si le contenu enregistré est jugé problématique. Très souvent, les ordinateurs des cybercafés ne sont pas munis de lecteurs de disques ou de prises USB. Les utilisateurs de l’Internet doivent souvent montrer une pièce d’identité au propriétaire ou au gérant du cybercafé. Les propriétaires de téléphones publics, de télécopieurs et de photocopieuses sont également incités par la police à surveiller leurs clients et à ne pas hésiter à demander une pièce d’identité.

Yahyaoui a bénéficie d’une libération conditionnelle à la fin de 2003, après avoir purgé la plus grande partie de sa peine. Son courage, ainsi que plusieurs campagnes locales et internationales ont permis de mettre fin à son supplice. Cependant, il est peu probable que ce jeune diplômé universitaire par ailleurs intelligent trouvera du travail si facilement dans un pays où il est courant, y compris dans le secteur prive, de demander le feu vert de la police avant d’offrir un poste aux jeunes, en recherche d’emploi.

Yahyaoui a indiqué que certains de ses amis qui contribuaient régulièrement à son magazine en ligne avaient émigré en Occident car ils sentaient qu’il n’était plus sur de vivre en Tunisie. Il a ajouté que tous ceux qui critiquent Ben Ali sont considérés comme des terroristes ou des traîtres. Par ailleurs, il a affirmé que le président Ben Ali, ainsi que les médias contrôlés par l’ةtat, accusent souvent les défenseurs des droits de la personne et les activistes politiques de « trahison » ou de « servir des intérêts étrangers. »

Lors de la visite de la mission de l’IFEX en Tunisie en janvier 2005, un test en direct du blocage de l’Internet a été effectué. Ce test a été effectué à travers le fournisseur de service 3s GlobalNet et a permis de constater qu’au moins 20 sites d’actualités et d’information étaient bloqués par des systèmes de filtrage électroniques.

Une liste de ces sites est présentée à l’Annexe 2 du présent document. Ces sites sont tous accessibles à l’extérieur de la Tunisie et aucun ne semblait fournir des informations qui justifieraient un blocage pour des raisons liées aux normes internationales de liberté d’expression. Ce que ces sites ont en commun, c’est qu’ils présentent des informations et des points de vues indépendants, qui sont parfois critiques à l’endroit du gouvernement tunisien.

Nous avons trouvé des similitudes dans le blocage effectué à travers d’autres fournisseurs de service lorsque nous les avons testés à travers des serveurs mandataires, ce qui laisse croire que le blocage des sites est spécifique, systématique et que le contrôle du blocage est centralisé.

Une exception possible s’appliquerait aux fournisseurs de service dont l’accès Internet ne se fait pas seulement à travers l’Agence tunisienne responsable de l’Internet, mais également par satellite.

Le blocage Internet semble s’effectuer grâce au logiciel SmartFilter version 3. SmartFilter est un logiciel qui a été mis au point et qui est vendu par une entreprise des ةtats-Unis, Secure Computing. Ce logiciel permet d’activer ou désactiver différentes catégories de sites Web. En plus, il permet de bloquer certaines adresses URL précises.

En Tunisie, l’utilisation de SmartFilter semble s’appliquer aux catégories de sites liés à la nudité, à la pornographie et aux « anonymiseurs » (anonymisers). En plus, un certain nombre d’adresses URL sont activées pour assurer le blocage de sites Web. Parmi celles-ci, on trouve les adresses des sites de nouvelles et d’information énumérés à l’annexe 2.

La technologie permet une activation simple des sites qui doivent être autorisés ou bloqués, et nous avons recueilli des preuves nous indiquant que l’accessibilité de certains sites est variable. Pendant des années, par exemple, les sites de groupes humanitaires comme Amnesty International, Human Rights Watch, Human Rights First, et le Comité pour la protection des journalistes ont été systématiquement bloqués. De même, les sites de quotidiens étrangers comme Le Monde et Libération, ainsi que l’hebdomadaire satirique Le Canard Enchaîné et le mensuel Le Monde Diplomatique ont été bloqués. Ces sites étaient accessibles en janvier 2005 alors que d’autres, surtout ceux offrant un point de vue alternatif sur la Tunisie, demeuraient bloqués.

Amnesty International-Tunisie rapportait que les sites du groupe international de défense des droits de la personne, basé à Londres, ainsi que ceux de certaines de ses sections dans des pays comme la France et le Canada, n’étaient plus bloqués à la fin janvier 2005. Selon certains membres de son propre comité exécutif, le site de l’organisme, AI-Tunisie, a été brièvement accessible pendant la visite de la délégation de l’IFEX. Les membres du comité exécutif ont jugé que ce fait n’était « pas entièrement le fruit d’une coïncidence. »

Le 30 janvier 2005, Fathi Chamkhi, porte-parole du Rassemblement pour une alternative internationale de développement, RAID-Tunisie, également connue comme la section tunisienne d’ATTAC, a rapporté que le site de son groupe pouvait désormais être consulté en Tunisie pour la première fois depuis cinq ans.

Chamkhi a indiqué dans un communiqué de presse reproduit par le magazine en ligne Tunisnews que la visite récente en Tunisie du Groupe de l’IFEX chargé de l’observation de l’état de la liberté d’expression en Tunisie avait « de toute évidence contribué à ce développement. » Il a ajouté que les campagnes précédentes visant à libérer Zouhair Yahyaoui et les campagnes actuelles visant à libérer les Internautes de Zarzis et les jeunes de l’Ariana contribuaient également à mettre fin au blocage des sites Web du RAID-ATTAC Tunisie. Comme l’ont également fait les luttes d’ONG tunisiennes indépendantes et de journalistes qui ont aidé à lever le voile, partiellement, sur les pratiques du régime tunisien qui visent à brimer les libertés individuelles.

De telles pressions auraient incité le gouvernement à suspendre temporairement au blocage des sites de groupes de défense des droits, tant locaux qu’internationaux, surtout lorsque la Tunisie accueille des réunions et des visiteurs internationaux.

Différents éditeurs dont les sites Web sont hébergés à l’extérieur du pays indiquent que les raisons pour lesquelles l’Internet est si bien contrôlé par les fournisseurs de service proches du régime, y compris la fille du président Ben Ali et l’agence Internet tunisienne, sont purement politiques.

Les éditeurs de magazines en ligne ont eu recours à l’Internet en raison de l’absence d’un journalisme indépendant et parce que le gouvernement n’a pas encore réussi à complètement museler la liberté d’expression sur l’Internet, grâce aux serveurs mandataires et aux pressions exercées par la communauté internationale.

Sihem Ben Sedrine, Naziha Rejiba, co-éditrices de Kalima et Nadia Omrane, éditrice d’Alternative citoyenne, contribuaient à des journaux indépendants comme Ar rai (L’opinion), Le Phare, et le Maghreb, qui ont été contraints à la fermeture par le gouvernement il y a plusieurs années.

Selon la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, la surveillance policière serrée de l’Internet et le harcèlement et l’emprisonnement de Zouhair Yahyaoui et Abdallah Zouari ont eu un effet néfaste sur l’utilisation de l’Internet.

« En Amérique latine, le taux des utilisateurs d’Internet est de 1000 pour 10 000 habitants et en Asie du Sud et de l’Est, ce taux est de 2000 pour 10 000 habitants. En Tunisie, ce taux est de 750 pour 10 000 habitants, selon la LTDH, qui ajoute que la plupart des utilisateurs de l’Internet en Tunisie sont des employés du gouvernement et que l’utilisation de l’Internet à des fins personnelles ne représente que 7,5% de l’utilisation totale. La LTDH indique également qu’il existe 0,3 cybercafés pour 10 000 habitants en Tunisie alors que l’Algérie voisine en compte 4 fois plus, c’est-à-dire 1,3 cybercafés pour 10 000 habitants.

Le gouvernement tunisien dispose de ses propres statistiques : « 900 000 utilisateurs de l’Internet en janvier ; 12 fournisseurs d’accès, dont cinq appartiennent au secteur public ; 310 cybercafés à la fin de 2004. »

3. Blocage de la diffusion de livres et de publications

Le marché tunisien du livre est relativement restreint. Il comprend des ouvrages en langue française et arabe. Il existe plus de 40 éditeurs en Tunisie, tant privés que publics. Parmi les plus importants, on note : Cérès Editions (privé), Sud ةditions (privé), et la Maison Arabe du Livre (public).

Les petits éditeurs ont souvent subi des contrôles fiscaux comme mode d’intimidation et de pression, alors que de nombreux ouvrages étaient bloqués au stade du « dépôt légal. » Un livre sur la sexualité écrit par une femme a récemment illustré cette situation.

Tel qu’exigé par la loi (le Code de la presse), l’imprimeur dépose un certain nombre d’ouvrages mais ne reçoit jamais de récépissé de la part des autorités. Ainsi, l’ouvrage en question ne peut être diffusé même après que la procédure formelle du dépôt légal a été effectuée. Un livre écrit par le fils de Mohieddine Klibi, l’une des figures marquantes de la lutte nationale pour l’indépendance, n’a ainsi jamais été autorisé.

Les livres de Mohamed Talbi sont toujours bloqués au « dépôt légal. » Talbi, ancien doyen de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Tunis, et éminent défenseur de la libre expression et du dialogue entre les religions, a également vu ses livres, autorisés depuis des années par les censeurs tunisiens, disparaître des librairies. Son plus récent ouvrage, « Penseur libre en Islam » publié en France en 2003 chez Albin Michel, est toujours interdit en Tunisie.

Son éditeur français lui en a envoyé 25 copies, mais le ministère de l’Intérieur les lui a confisquées, sans lui fournir de récépissé.

« Il y a près de deux ans, j’ai humblement et poliment demandé au ministère de l’Intérieur de me fournir un document expliquant que mon livre était interdit. Les représentants du ministère ont refusé, prétextant que mon livre pourrait peut-être, un jour, être vendu librement, » explique l’universitaire d’un certain âge.

La libre circulation des livres et des publications entre ةtats arabes n’existe pas, pas plus qu’elle n’existe entre la France et la Tunisie, par exemple. Les autorités tunisiennes prennent soin de censurer tout livre étranger qui entre au pays.

Talbi dit également : « Un jour, les douanes ont saisi un livre que j’avais acheté à Rome, intitulé Le catéchisme de l’église catholique. Ils m’ont ensuite demandé ce que voulait dire catéchisme.

Talbi, qui préside un groupe non autorisé de défense de la liberté d’expression nommé OLPEC (Observatoire de la liberté de presse, d’édition et de création), a remis en question l’utilité de la présence de groupes internationaux de défense de la liberté d’expression à l’occasion du SMSI, puisque, dit-il, « les Tunisiens n’ont pas librement accès aux médias locaux. »

Moncef Marzouki, ancien président de la LTDH et porte-parole du CNLT et actuellement chef d’une formation politique non autorisée, le Congrès pour la République, a vu ses livres disparaître des librairies tunisiennes, même ses ouvrages traitant de l’éducation aux droits humains et à la santé. Certains de ses livres récents traitant de la lutte pour la démocratie et les droits de la personne dans le monde arabe ont été publiés en dehors de la Tunisie, notamment au Maroc.

Plusieurs livres critiquant le piètre bilan du gouvernement tunisien dans le domaine des droits de la personne, y compris un ouvrage récent de Sihem Ben Sedrine et Omar Mestiri intitulé « L’Europe et ses despotes » ont été publiés en France. ہ l’aéroport de Tunis Carthage, les livres achetés par des Tunisiens, particulièrement les activistes des droits de la personne et les dissidents, sont confisqués par les douaniers. Ben Sedrine a ainsi vu ses livres confisqués a plusieurs reprises.

Il n’existe aucune règle claire en matière de censure et d’interdiction de distribuer un livre ou une publication. Un tel comportement arbitraire a sans aucun doute nui gravement nui au développement de la créativité et de la vie culturelle en Tunisie, l’autocensure semblant désormais faire partie de la nature même des Tunisiens.

Il n’existe aucune explication rationnelle, par exemple, à la confiscation fin novembre 2004 à l’aéroport de Tunis Carthage de dix livres apportés du Caire par Neji Merzouk, membre du conseil de la LTDH et dirigeant d’une petite maison d’édition nommée « Samed » à Sfax, la seconde ville tunisienne en importance. ہ part le rapport annuel de l’Organisation arabe des droits de l’homme, basée au Caire, les neuf autres livres n’avaient rien à voir avec la Tunisie. Certains ouvrages critiquaient sévèrement l’Islam radical, que le gouvernement tunisien prétend combattre. Parmi les livres confisqués, on trouvait également « Emarat Yacoubian » (L’immeuble Yacoubian), un best-seller de l’auteur égyptien Alaa Al Aswany !

Deux livres en arabe publiés par la maison de Merzouk, « Samed, » attendent d’être autorisés depuis 2003 pour pouvoir se retrouver en librairie. Le premier est un ouvrage de Nejib Saadaoui intitulé « Mesbah El-Jarboue : un héro du pays des figuiers et des oliviers » ; le second est un recueil de poèmes de Kamel Ghali.

En 1996, la police a effectué une descente dans les locaux de la maison d’édition Samed à Sfax et plus tard chez lui à Chebba, pour saisir 12 869 exemplaires de 13 livres qui avaient été autorisés plusieurs années auparavant par le gouvernement. Sa lettre de protestation datée du 23 mai 1996, qui dénonçait un tel abus de pouvoir, adressée au ministère de l’Intérieur, est demeurée sans réponse.

Selon la Ligue des écrivains libres, interdite, « Samed » est la dernière « maison d’édition combattante » en Tunisie, qui jouerait un rôle semblable à celui de Aloès, la défunte maison d’édition de Sihem Ben Sedrine, « quoique dans une moindre mesure. » La maison d’édition Aloès a été cambriolée à deux reprises par des membres présumés de la police politique, et tout son matériel informatique a été volé.

Hafidha Chékir, professeur de droit qui défend les droits de la personne, a vu en 2000 son livre « Les droits des femmes entre les textes et les résistances » mis en vente à Tunis par la maison d’édition Chama. Près de six mois plus tard, le livre a soudainement été retiré des librairies par les autorités, sous prétexte qu’il nécessitait un dépôt légal ! Ironiquement, le livre figurait jusqu’à récemment sur les rayons de la bibliothèque de la Faculté de droit et de sciences politiques, où Chékir enseigne depuis plus de 25 ans.

L’ouvrage de Chékir est basé sur les recherches de sa thèse de doctorat, thèse pour laquelle elle reçut en 1998 le Prix des droits de la personne de la Société française de droit international.

En 2004, l’Institut arabe des droits de l’homme, basé à Tunis, envoyait chez l’imprimeur un manuscrit en arabe écrit par Hafidha Chékir intitulé « Guide sur la participation des femmes arabes à la vie politique. » Cet ouvrage attend toujours une autorisation, suite au « dépôt légal » habituel.

Un tel comportement arbitraire dans le domaine de l’édition et de la diffusion d’ouvrages écrits, qui suivent souvent le discours officiel des droits de la personne, de la modernité et de l’islam radical, devient de plus en plus courant depuis le coup d’état du président Ben Ali, que les journalistes tunisiens se doivent de nommer « le Changement. »

La section tunisienne d’Amnesty International a attendu près de cinq ans après s’être acquitté des formalités liées au « dépôt légal » avant d’avoir l’autorisation d’utiliser un guide sur l’éducation aux droits de la personne. Ce guide, préparé à la fin des années 1990 en collaboration avec la section norvégienne d’Amnesty International, n’aurait pas pu être publié sans l’appui de certaines sections influentes du mouvement.

Depuis des années, AI-Tunisie a vu des milliers de documents, dont le rapport annuel d’Amnesty International, bloqués aux douanes. Ses lignes téléphonique et de télécopieur ont été coupées et son courrier a souvent été volé dans sa boîte aux lettres. « Les pressions internationales peuvent porter fruit et aider à réduire l’emprise de cet ةtat autocratique et pervers qui porte continuellement atteinte aux libertés fondamentales, » déclare un ancien président d’AI-Tunisie.

L’Association tunisienne des femmes démocrates attend depuis 1994 la permission des autorités de publier un livre intitulé « La violence envers les femmes. » Il s’agit d’une compilation de documents et de discours présentés à l’occasion d’un séminaire international qui a eu lieu à Tunis en novembre 1993. Une affiche conçue pour l’événement par cette association indépendante et assiégée visant à sensibiliser la population aux droits des femmes et à les protéger d’actes de violence, est également retenue depuis 1993 chez un imprimeur, sur ordre des autorités.

Malgré tous les obstacles et les actes de harcèlement auxquels font face les éditeurs indépendants, le gouvernement discute depuis des années d’un projet de convention avec l’Union des éditeurs tunisiens (UET), visant de toute évidence à mieux contrôler le secteur de l’édition. L’UET, établie en 1972 et demeurée plus ou moins inactive pendant plus d’une décennie, s’est montrée de plus en plus intéressée à promouvoir la lecture et les livres suite à sa participation à diverses foires du livre (Paris, monde arabe). L’Union compte actuellement parmi ses membres près de 40 éditeurs, représentant 70% de l’industrie tunisienne de l’édition.

Le projet de convention définit certaines directives concernant les façons d’établir une maison d’édition et de distribuer des « livres culturels » ainsi que les sanctions pouvant s’appliquer aux éditeurs. Ces sanctions peuvent aller jusqu’à la fermeture de la maison d’édition si le ministre conclut que l’éditeur a commis « une faute professionnelle ou une violation éthique. »

Le cercle de la liberté d’expression se rétrécit, non seulement chez les éditeurs, mais également chez certains historiens de renom qui se consacrent à la recherche scientifique, comme Abdel Jelil Temimi fondateur et président de la Fondation Temimi pour la recherche scientifique et l’information (www.refer.org/fondationtemimi). Cette fondation s’est fait connaitre au cours des dernières années en en ignorant certaines « lignes rouges ». Elle a pris coutume de faire la lumière sur certains épisodes de l’histoire récente de la Tunisie et de traiter d’une manière scientifique certains sujets jugés « sensibles », tels que la censure dans le monde arabe. Les documents et les conclusions de sa première conférence sur la censure dans le monde arabe, qui a eu lieu en 2000, attendent toujours l’autorisation des autorités avant d’être publiés. Cette attitude négative du gouvernement tunisien n’a pas empêché la Fondation Temimi d’organiser sa seconde conférence sur la censure dans le monde arabe, en novembre 2004.

La Fondation Temimi, qui jouit d’une certaine liberté d’expression, sans commune mesure avec celle qui prévaut dans les universités et dans les centres de recherche étatiques, attend depuis près de dix mois l’autorisation du gouvernement de publier un livre présentant des témoignages liés à la confrontation entre le parti au pouvoir et l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT) en 1978, épisode connu sous le nom de « jeudi noir » et qui a fait de nombreuses victimes parmi la population. Apparemment, les censeurs n’appréciaient pas le témoignage de Taieb Baccouche, ancien secrétaire général de l’UGTT et actuel Président de l’Institut arabe des droits de l’Homme.

Par ailleurs, plusieurs ouvrages de Tunisiens en exil forcé, notamment Ahmed Manai, Sadri Khiari, Taher Labidi, Olfa Lamloum, Taoufik Medini, Mohamed Mzali, Rached Ghannouchi... n’ont pas réussi à trouver le chemin des librairies tunisiennes contrôlées par l’ةtat. Pas plus que n’ont réussi à le faire certains livres publiés récemment par les journalistes français Nicolas Beau et Jean-Pierre Tuquoi et les universitaires français Michel Camau et Vincent Geisser… ou l’universitaire canadienne Lise Garon.

4. Atteinte à la liberté d’association, y compris au droit des organisations d’être légalement reconnues et d’organiser des réunions

Bien qu’il existe 8 000 associations officiellement reconnues en Tunisie, seule une douzaine sont réellement indépendantes, comme la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’Homme (LTDH), l’Association tunisienne des femmes démocrates, la section tunisienne d’Amnesty International, le Conseil national des libertés en Tunisie (CNLT), la Ligue des écrivains libres, le Centre de Tunis pour l’indépendance de la Justice (ces trois dernières ne sont pas reconnues)... La centaine d’associations restantes, ironiquement qualifiées d’ONG par les médias contrôlés par l’ةtat, est étroitement supervisée par le ministère de l’Intérieur et le parti au pouvoir. Même la liste des membres des comités directeurs des clubs sportifs et des associations culturelles doit être approuvée par les autorités.

La plupart des associations que le gouvernement incite à prendre part à des rassemblements et séminaires internationaux en tant qu’ « ONG » sont des organisations parrainées par les autorités. Elles ne peuvent être considérées comme indépendantes du pouvoir en place. Les associations véritablement indépendantes doivent travailler dans la clandestinité. Leurs communications (poste, courriel, télécopie) sont surveillées. Il n’est pas rare que ces associations, ainsi que leurs principaux animateurs et certains membres, reçoivent des virus ou des lots de 200 ou 300 courriels identiques provenant d’inconnus, qui bloquent leurs serveurs de courriel. Leur courrier et leurs colis postaux sont souvent ouverts ou ne parviennent pas à destination.

Les conversations téléphoniques sont surveillées. La liberté de mouvement est très souvent restreinte, soit à l’intérieur du pays, soit pour sortir du pays.

Toutes les ONG indépendantes rencontrées par le groupe de l’IFEX chargé de l’observation de l’état de la liberté d’expression en de la Tunisie cherchent à obtenir une reconnaissance légale de la part du gouvernement tunisien. Une reconnaissance légale leur permettrait de s’exprimer plus librement. En d’autres termes, la situation de la liberté d’expression en Tunisie, y compris la liberté de publier, ne saurait s’améliorer tant que les ONG ne seront pas officiellement reconnues par les autorités. La reconnaissance véritable est un premier pas nécessaire sur le chemin d’une plus grande liberté d’expression en Tunisie.

L’augmentation des restrictions légales et administratives freinant la liberté d’association a conduit plusieurs militants des droits civils - notamment depuis 1998, année du 50e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’Homme - à former des groupes et à exercer leur droit d’association et de réunion sans attendre l’autorisation du gouvernement.

Le Conseil national des libertés en Tunisie Le CNLT fut fondé en décembre 1998 par un groupe de défenseurs des droits de l’Homme, suite aux attaques sans précédent auxquelles fut soumise la LTDH, qui se trouvait dans un état d’hibernation forcée à partir de 1992. Les rapports du CNLT au sujet des violations des droits de l’Homme signalaient que ses membres dirigeants subissaient continuellement des actes de violence, y compris des arrestations, des agressions physiques et du harcèlement.

Le 11 décembre dernier, environ 150 policiers en civil bloquèrent l’accès à une réunion du CNLT à Tunis. « Plusieurs de nos membres ont été agressés par la police ce jour-là. Trois d’entre eux ont été blessés, dont l’un a eu les côtes brisées », a affirmé Sihem Ben Sedrine. Au mois de janvier 2005, une autre réunion du CNLT a coïncidé avec la visite des membres de l’IFEX en Tunisie. Le 16 janvier 2005, les militants du CNLT se sont vu refuser l’accès à leurs bureaux situés au centre de Tunis, sur la rue Abou Dhabi, par de nombreux policiers en civil. Du reste, les membres de l’IFEX, lors d’une visite effectuée plus tard au bureau du CNLT, ont remarqué la présence de certains de ces policiers.

En général, les ONG non reconnues tiennent leurs réunions dans les demeures de leurs principaux dirigeants, mais les militants sont souvent empêchés de prendre part à ces réunions, considérées comme « illégales » par les autorités.

L’Association de lutte contre la torture en Tunisie (ALTT)

L’ALTT fait partie des groupes qui ne possèdent pas de reconnaissance officielle. « Lorsque nous parlons entre nous au téléphone, cela ne prend pas beaucoup de temps avant que la police se manifeste. De toute évidence, nos téléphones sont sur table d’écoute. Il y a environ un an, près de 40 policiers en civil ont encerclé mon bureau. C’est là une manière de nous décourager et de nous retirer le droit d’opérer dans le cadre de la loi », affirme Radhia Nasraoui.

Le 8 juin 2004, Nasraoui et d’autres membres fondateurs de l’Association de lutte contre la torture en Tunisie furent attaqués par environ 17 policiers en civil, et furent empêchés de déposer auprès des autorités de Tunis une demande de reconnaissance légale pour leur association. Ridha Barkati, trésorier de l’association, dont le frère militant politique est mort sous la torture, il y a plusieurs années, fut jeté dans un taxi après qu’on lui a ordonné de quitter les lieux.

- L’Association internationale de soutien aux prisonniers politiques (AISPP)

Ce groupe, créé il y a environ trois ans, est très actif et dénonce la situation désespérée de près de 500 prisonniers politiques et ex-prisonniers politiques. En 2002, lorsqu’ils ont voulu déposer une demande pour obtenir une reconnaissance légale, les membres du Bureau directeur ont été attaqués et harcelés par la police. Les policiers leur ont dit qu’un bureau traitant ce genre de demande n’existait pas ! Par la suite, ils ont envoyé leur demande, par courrier recommandé, aux autorités compétentes ; l’enveloppe contenant leur demande fut ouverte et leur fut finalement retournée sans commentaire ni récépissé.

Mohamed Nouri, directeur du groupe, ainsi que d’autres membres de la direction, dont Saida Akremi et Samir Ben Amor, sont constamment harcelés et suivis par les policiers. Des policiers en civil sont régulièrement postés en face de leurs bureaux, pour intimider leurs clients. Leur demeure fait souvent l’objet d’une surveillance policière.

Nouri, Akremi et Ben Amor sont avocats. Les problèmes de Nouri ont débuté il y a quinze ans environ, lorsqu’il fut poursuivi devant une cour militaire pour avoir exprimé, dans l’hebdomadaire El Fajr, l’opinion que les tribunaux militaires sont inconstitutionnelles. Il fut condamné à six mois de prison, mais ne fut libéré que huit mois plus tard.

Le Centre de Tunis pour l’indépendance de la justice (CTIJ)

Les efforts déployés par ce groupe, créé il y a environ deux ans par de nombreux avocats et professeurs de droit pour obtenir la reconnaissance légale des autorités, ont échoué a ce jour.

Le groupe est dirigé par Mokhtar Yahyaoui, l’un des juges les plus courageux et les plus respectés de Tunisie. Sa lettre de 2001 au Président Ben Ali, le priant de mettre un terme au manque d’indépendance de la Justice en 2001, fut très appréciée par les défenseurs des droits de l’Homme et les démocrates. Mais son courage lui a coûté très cher. Il fut congédié et agressé dans les rues de Tunis par des « voyous ». De plus, son neveu fut jeté en prison pour le seul motif d’avoir publié sa lettre ouverte sur son site web.

En septembre 2004, le harcèlement quotidien, par des policiers en civil, des ouvriers chargés de peindre et de réaménager son bureau en bureau d’avocat, l’a conduit à changer d’idée concernant la possibilité de pratiquer le droit dans des conditions aussi pénibles.

La Ligue des écrivains libres (LEL)

La LEL n’est pas officiellement reconnue par les autorités. La ligue a deux requêtes : 1) amélioration du Code de la presse (« délivrez le récépissé ! ») ; 2) exemption, pour les livres, de l’application du Code de la presse, ou abrogation du Code de la presse.

L’histoire de la LEL montre à quel point les autorités tunisiennes ne respectent pas le droit de réunion. Le 13 juillet 2001, la LEL déposait ses statuts. Ce ne fut pas chose facile. Parfois, en effet, les autorités, qui savent quand une future association compte déposer ses statuts, bloquent (physiquement) l’entrée officielle de l’édifice, ou refusent de délivrer un récépissé attestant le dépôt des statuts. C’est ainsi que les choses se sont passées pour Raid -ATTAC Tunisie. Les autorités ne leur ayant jamais délivré de récépissé, ils ne peuvent intenter une poursuite en justice pour contester une absence de décision.

Deux mois plus tard, les autorités informèrent la LEL qu’elle ne serait pas reconnue. En 2004, celle-ci déposa une plainte auprès du tribunal administratif. Celui-ci fit parvenir un questionnaire à la LEL ainsi qu’au ministère de la Culture. Ce dernier fournit trois motifs pour expliquer son refus de reconnaître la LEL :

Il existe déjà une union des écrivains tunisiens. Le mot « libre » pose problème. Il semble que l’association désire exclure les écrivains qui ne sont pas libres. Les statuts comprennent un article stipulant que la LEL défendra les intérêts des écrivains, ce qui l’apparente plus à un syndicat qu’à une association.

Le tribunal administratif, dont les décisions ne sont pas contraignantes, n’a pas encore rendu son jugement. Selon des avocats, il est peu probable qu’un jugement soit rendu avant 2007.

Il est intéressant de remarquer que les mêmes motifs ont été avancés pour refuser d’accorder une reconnaissance officielle à l’OLPEC.

L’Observatoire pour la liberté de la presse, de l’édition et de la création (OLPEC)

L’OLPEC a été fondé en 2001. Les autorités ont refusé d’accuser réception de la demande d’accréditation officielle de 2001. Au bout d’un certain temps, le 3 mai 2001, l’OLPEC a finalement reçu un récépissé. Trois mois plus tard, les autorités, comme elles sont légalement tenues de le faire, informèrent l’OLPEC que sa demande ne serait pas acceptée. Les objectifs de l’OLPEC sont les suivants :

Enquêter sur la censure du livre, de la presse et de la création artistique. Publier périodiquement des rapports sur l’état de la liberté d’expression. Alerter l’opinion sur les cas particuliers de violation de la liberté d’expression. Proposer des réformes visant à améliorer la situation de la liberté d’expression en Tunisie.

En 2001, l’OLPEC porta plainte auprès du tribunal administratif. Son cas est toujours en suspens. Il est à remarquer que, très souvent, il n’est même pas possible de formuler une plainte officielle, car les autorités n’ont pas accusé réception de la demande officielle d’accréditation (le récépissé n’ayant jamais été délivré). Comme dans le cas de la LEL, les motifs donnés par le ministère de la Culture sont les suivants :

Appellation inappropriée. Les objectifs de l’association sont assez larges pour en faire une organisation politique.

Le Rassemblement pour une alternative internationale de développement, RAID - Tunisie

Ce groupe a été créé en 1999. Des quelques quarante sections nationales que comporte cette association internationale, seule la section tunisienne est dépourvue d’accréditation légale. Son porte-parole, Fathi Chamki, est l’un des militants les plus harcelés. Au cours des dernières années, il fut torturé, maltraité et arbitrairement emprisonné pendant près d’un mois. Les membres de son association sont également harcelés : ils sont sous surveillance policière, leur liberté de mouvement étant sévèrement limitée et leurs communications téléphoniques ou postales interceptées.

En juin 2004, le ministère de l’Intérieur met un demeure la Ligue tunisienne des droits de l’Homme et le Parti démocrate progressiste de ne pas accueillir le second congrès de la section tunisienne du Rassemblement pour une alternative de développement. En octobre 2004, les forces de police ont empêché les militants de RAID d’avoir accès au siège social du Forum démocratique pour le travail et les libertés et donc de tenir leur second congrès. Chamkhi soutient que « la solidarité internationale peut nous être d’un grand secours en forçant la main au régime dictatorial pour nous permettre de tenir notre deuxième congrès ».

Les partis politiques qui se permettent de critiquer les politiques du Président Ben Ali peuvent également voir leurs dirigeants attaqués, même si leur parti a déjà reçu une accréditation. Ainsi, le Parti démocratique progressiste (PDP) et le Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDTL) ne sont pas traités par les autorités sur un pied d’égalité avec certains groupes politiques moins importants. Ils font constamment l’objet de surveillance policière et n’ont pas accès aux facilités offertes à d’autres groupes politiques mineurs, sous prétexte qu’ils ont boycotté les élections de 2004.

Dirigé par Moustafa Ben Jaafar, ancien membre du Comité directeur de la LTDH, le Forum démocratique pour le travail et les libertés, qui a dû attendre huit ans avant d’obtenir son accréditation légale en 2002, est actuellement la cible de poursuites judiciaires de la part d’individus considérés, selon des défenseurs des droits humains, comme proches du ministère de l’Intérieur. En janvier 2004, les problèmes de Ben Jaafar se sont subitement aggravés, après que son groupe politique ait décidé de boycotter ce qu’ils appelaient « la farce des élections présidentielles et législatives ».

La plupart des groupes de défense des droits humains ou formations politiques non reconnus par les autorités, ont souvent fait appel, en vain, a ces dernières pour qu’elles respectent la Constitution, la Convention internationale pour les droits civils et politiques, ainsi que la Déclaration du droit et de la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et de protéger les droits de l’Homme et les libertés fondamentales universellement reconnus, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies, le 9 décembre 1998.

Dans ses « Remarques sur les conclusions préliminaires de la mission de l’IFEX en Tunisie », l’Agence tunisienne de communication externe affirme que chaque Tunisien est libre de rejoindre ou de ne pas rejoindre les rangs des associations qui existent dans le pays et que « la société civile tunisienne est remarquablement dynamique ».

L’agence donne comme exemple l’Association des journalistes tunisiens (AJT), qui publie « chaque année son propre rapport sur l’état de la presse en Tunisie ».

En fait, l’Association des journalistes tunisiens était une des organisations de journalistes les plus indépendantes dans le monde arabe, jusqu’à ce qu’elle fut contrainte en 1993 par les autorités de soutenir la candidature du président Ben Ali au scrutin présidentiel de mars 1994.

L’Association des journalistes tunisiens, un modèle d’indépendance ou un outil de propagande ?

L’Association des journalistes tunisiens a souvent fermé les yeux sur les attaques croissantes à l’endroit des médias, le harcèlement et l’emprisonnement des journalistes. Sa décision de décerner sa « Plume d’or » au Président Ben Ali en décembre 2003 a entraîné sa suspension en mars 2004 par la Fédération internationale des journalistes (FIJ), et a amené des journalistes tunisiens indépendants à créer un nouveau syndicat en mai 2004 : le Syndicat indépendant des journalistes tunisiens.

Le dernier rapport de l’Association des journalistes sur l’état de la presse en Tunisie fut largement distribué en dehors du pays et auprès des diplomates occidentaux accrédités à Tunis. Le rapport semble s’inscrire dans le cadre d’une stratégie, encouragée par le gouvernement, visant a la levée de la suspension de l’Association des journalistes tunisiens lors du Congrès de la FIJ tenu à Athènes, en mai 2004.

Les autorités tunisiennes conseillent souvent aux visiteurs internationaux de rencontrer les présidents de l’Association des journalistes tunisiens et de l’Association tunisienne des éditeurs de journaux (expulsée en 1997 par l’Association mondiale des journaux (AMJ) pour son inaction face aux atteintes à la liberté de la presse en Tunisie. Ces deux associations sont dirigées depuis quinze ans par des membres du parti au pouvoir du Président Ben Ali, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD). Il en va de même pour d’autres groupes mis sur pied par les autorités dans le but de donner l’impression que la société civile tunisienne est dynamique et pluraliste.

De tels regroupements, téléguidés par les autorités, sont encouragés à prendre part aux conférences internationales, y compris le Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI). Ceux qui défendent les droits humains et les militants politiques trouvent ironique que ces groupes manipulés par l’ةtat soient considérés comme des ONG et disposent d’une accréditation auprès du SMSI, alors que les groupes indépendants se voient refuser l’accréditation, simplement parce qu’ils ne disposent d’aucune reconnaissance légale dans ce régime autocratique.

5. Restrictions à la liberté de mouvement des défenseurs des droits de l’Homme et des dissidents politiques

Les militants sont parfois assignés à domicile pour de très courtes périodes de temps, en violation de leur droit à la liberté de mouvement et d’expression. On leur retire le droit de quitter leur demeure pour participer à une réunion, même si elle a lieu au siège social d’un groupe de défense des droits de l’Homme ou d’un groupe politique autorisés. Aucune explication écrite n’est fournie, mais uniquement un avertissement oral portant sur les conséquences qui suivraient le non-respect d’une telle décision arbitraire.

- Abdallah Zouari : harcelé

Zouari collaborait à l’hebdomadaire Al-Fajr, jusqu’à la disparition de ce journal à la suite de l’emprisonnement de son directeur Hamadi Jebali en 1991. Un an plus tard, il fut condamné par une cour militaire à onze ans de prison et à cinq ans de « contrôle administratif » pour avoir appartenu à une « organisation illégale » et avoir projeté de « changer la nature de l’ةtat ».

Depuis sa sortie de prison en juin 2002, il a été, à toutes fins pratiques, assigné à demeure dans la banlieue de la petite ville de Zarzis, située à environ 500 km au sud-est de Tunis. Le ministère de l’Intérieur lui a ordonné de demeurer à la résidence de ses beaux-parents, où il est surveillé étroitement par neuf policiers 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

La liberté de mouvement et d’expression de Zouari est soumise à de lourdes restrictions. En juillet 2003, une cour cantonale le condamnait à quatre mois de prison pour « diffamation ». La première accusation concernait une dispute qu’il avait eue avec le propriétaire d’un café Internet qui voulait lui interdire l’accès à son établissement, pour se conformer aux directives policières. Un mois plus tard, il fut arrêté, accusé de bafouer son « contrôle administratif » et condamné à neuf mois de prison. La seconde accusation concernait la visite d’un marché local situé à environ 40 km de Zarzis, en compagnie de trois avocats dévoués à la cause des droits de l’Homme.

En tant que collaborateur des web magazines NahdhaNet (www.nahdha.net), Kalima (www.kalimatunisie.com) et Tunisia Post (www.tunisnews.com), Zouari n’est pas le bienvenu dans les cafés Internet, qui sont soumis à une surveillance policière régulière.

Pour la seconde fois en moins d’un an, le 23 janvier 2005, Zouari entreprit une grève de la faim pour attirer l’attention sur sa situation, pour défendre son droit de s’exprimer et de travailler librement, et de vivre sous le même toit que sa femme et ses enfants, qui vivent dans la cité résidentielle d’El-Mourouj, dans la banlieue sud de Tunis.

- Sihem Ben Sedrine et Néziha Réjiba : harcelées

Responsables, la première, de la section française et la seconde, de la section arabe, du magazine en ligne Kalima (www.kalimatunisie.com), Sihem Ben Sedrine et Néziha Réjiba sont fréquemment harcelées ; elles sont également l’objet d’une surveillance policière constante. De nombreux policiers en civil campent parfois en face de leur demeure.

Ben Sedrine et Réjiba, également connues sous le nom de Om Zyed, sont devenues des cibles privilégiées de la police politique tunisienne, pour avoir dénoncé les violations des droits de l’homme et avoir transgressé un certain nombres d’interdictions, par exemple en critiquant le gouvernement autocratique du Président Ben Ali et en dénonçant l’implication de membres de sa famille dans des transactions financières douteuses. En 2001, Ben Sedrine fut arbitrairement détenue pendant des semaines après avoir abordé le thème de la corruption en Tunisie, lors d’un programme diffusé par un chaîne de télévision arabe émettant à partir de Londres.

Réjiba a été condamnée à huit mois de prison avec sursis et à une amende de 1 200 dinars (environ 1 000 $ US), après avoir prétendument transgressé la réglementation concernant la monnaie étrangère. Les avocats des droits de l’Homme ont soutenu que les accusations « étaient fabriquées de toute pièce et visaient à ternir son image, en raison de ses activités politiques et de ses articles courageux ». Cette condamnation avec sursis et cette amende sont survenues après qu’elle a critiqué la présence envahissante des portraits du Président Ben Ali dans les endroits publics.

D’autres défenseurs des droits de l’homme et militants politiques sont également des cibles privilégiées des policiers en civil. La longue liste des défenseurs des droits de l’homme et des dissidents rattachés à différents courants politiques qui ont à souffrir du harcèlement comprend entre autres les noms suivants :

Radia Nasraoui, Moncef Marzouki et son frère Mohamed Ali Bedoui (vivant maintenant en Europe de l’ouest, après avoir été arbitrairement emprisonnés et avoir perdu leurs emplois respectifs comme professeur de médecine et enseignant), Hamma Hammami, Nejib Hosni, Mokhtar Yahyaoui, Rouf Ayadi, Zouhaier Yahyaoui, Mohamed Nouri, Lassad Jouhri, Taoufik Ben Brick, Sadri Khiari, Saida Akremi, Mohamed Jemour, Bechir Essid, Slah Jourchi, Souhaier Belhassen, Ahlam Belhaj, Khédija Chérif, Alya et Khémais Chamari, Hédhili Abderrahmane, Samir Ben Amor, Mokhtar Trifi, Anouar Kousri, Ali Ben Salem, Salah Hamzaoui, Mustapha Ben Jaafar, Hachemi Jegham, Omar Mestirti, Abdel Kader Ben Khémis, Abdel Wahab Maatar, Noureddine Bhiri, Ridha Barkati, Chokri Latif, Fathi Chamkhi, Mongi Ben Salah, Ayachi Hammami, Moncef Ben Salem.

Plusieurs dissidents tunisiens vivent à l’étranger, notamment en France, comme par exemple Ahmed Manai, Mondher Sfar et Taher Labidi. Au cours des dernières années, ils ont été agressés, comme d’autres dissidents tunisiens en exil d’ailleurs, par des « voyous non identifiés ».

Les familles des militants politiques ou des défenseurs des droits de l’homme vivant en Tunisie ou en exil, de même que les anciens prisonniers d’opinion, surtout islamistes, font partie des cibles préférées des policiers tunisiens. Plusieurs Tunisiens ont payé cher leur engagement politique ou leur appartenance au mouvement des droits humains. Ce prix peut varier entre la perte d’emploi et l’emprisonnement, parfois pour le simple fait d’avoir aidé les familles dans le besoin des militants islamistes emprisonnés.

- Slim Boukhdhir : agressé et harcelé

Le 7 août 2004, lors d’une conférence de presse, Boukhdhir fut agressé par des voyous qui seraient proches de l’un des beaux-frères du Président Ben Ali. Depuis lors, il a perdu son emploi comme collaborateur à Akhbar Al-Joumhurya (Nouvelles de la République). Il a été harcelé et a reçu des menaces par téléphone, lui intimant de ne pas rendre son cas public.

- Lotfi Hajji et Mahmoud Dhaouadi : harcelés

Hajji est président et Dhaouadi secrétaire général du syndicat indépendant des journalistes tunisiens, fondé en 2004. Le 16 août, ils furent convoqués par le Directeur des Affaires politiques du ministère de l’Intérieur, qui mettait en doute la légalité du nouveau syndicat et des communiqués de presse.

Hajji et Dhaoudi répondirent aux responsables gouvernementaux que d’après le Code du travail, aucune autorisation n’était requise pour fonder un syndicat.

Par ailleurs, Hajji, un ancien rédacteur en chef adjoint a l’hebdomadaire Réalités et connu pour ses opinions indépendantes, s’est vu refuser l’accréditation comme correspondant de la chaîne de télévision qatarie Al-Jazeera. L’Agence tunisienne de communication extérieure a informé Al-Jazeera de la décision de refuser l’accréditation à Hajji.

La Tunisie est l’un des rares pays au monde à avoir interdit à Al-Jazeera l’ouverture d’un bureau à Tunis.

Le 16 janvier 2005, Fatih Chamki, porte-parole de la section tunisienne du Rassemblement pour une alternative internationale de développement, RAID-Tunisie, connue également comme la section tunisienne d’ATTAC, fut empêché de se rendre à une assemblée de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme. Plus tôt dans la matinée, Chamki avait informé les représentants des six organisations de l’IFEX séjournant en Tunisie qu’il se trouvait soudainement assigné à résidence.

Après qu’il a dit au téléphone qu’il s’apprêtait à démarrer son véhicule, trois voitures de police l’ont encerclé, lui interdisant d’aller où que ce soit. Il se préparait à partir pour assister à une réunion de la section de Kairouan de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (la ville de Kairouan est située à environ 140 km au sud de Tunis). Un des policiers signifia clairement à Chamkhi qu’il valait mieux pour lui qu’il ne se rende pas ou que ce soit ce jour-là.

Chamkhi décida de rester à la maison, conscient du fait qu’en enfreignant cet ordre, il risquait d’avoir à subir des brutalités policières. Sarah Carr, représentante de l’Organisation égyptienne des droits de l’homme et Alexis Krikorian (UIE) se sont portés volontaires pour se rendre visite a Chamkhi dans la banlieue sud de Tunis, afin de se rendre compte des violations de la liberté de mouvement des militants en Tunisie.

Des centaines d’ex-prisonniers politiques sont, comme le journaliste Abdallah Zouari, soumis à une surveillance policière constante et ne peuvent quitter l’endroit où ils résident sans l’autorisation préalable des forces policières. Lorsque nous avons rencontré Zouari sur sa motocyclette, à l’entrée de son village, le 18 janvier 2005, il était suivi de près par une Toyota occupée par deux policiers en civil. La patrouille le suivit lorsqu’il nous conduisit d’abord à sa maison puis, par la suite, lorsque nous rencontrâmes les parents et la famille des jeunes internautes de Zarzis.

Plusieurs des militants politiques et défenseurs des droits de l’Homme venus rencontrer les délégués représentant les membres de l’IFEX dans un hôtel de Tunis furent suivis par des policiers en civil. Durant notre séjour, jour et nuit, des policiers en civil surveillaient étroitement l’hôtel, de même que nos visiteurs. Les allées et venues du groupe de l’IFEX étaient constamment surveillées par la police.

Les défenseurs des droits de l’Homme, les militants politiques et les ex-prisonniers politiques, de même que leurs proches, se voient souvent retirer le droit de voyager, même s’ils sont détenteurs d’un passeport. Plusieurs d’entre eux ont eu recours à une grève de la faim durant les dernières années, avant que les autorités tunisiennes n’acceptent - en raison, souvent, des pressions de la communauté internationale - de leur remettre leurs passeports et de leur permettre de quitter le pays. La plus longue grève de la faim fut entreprise en 2000 par le journaliste Taoufik Ben Brick, après qu’on lui avait interdit de se rendre en France.

Parmi les défenseurs des droits de l’Homme à qui il est interdit de voyager, on signale : Mokhtar Yahyaoui et Mohamed Nouri. Les autorités ont pris l’habitude de fabriquer des poursuites judiciaires afin d’empêcher certains opposants ou défenseurs des droits humains de voyager. Des organisations tunisiennes et internationales de défense des droits humains estiment que les poursuites judiciaires contre Yahyaoui et Nouri ont un but politique et qu’elles violent le droit de liberté d’expression et de mouvement.

Ceux qui dirigent des associations qui sont véritablement indépendantes et des groupes politiques, reconnus ou non par les autorités, semblent faire fréquemment l’objet de filatures policières.

6. Le manque de pluralisme dans la propriété des ondes, avec une seule radio privée et un seul télédiffuseur privé

La décision du Président Ben Ali, rendue publique le 7 novembre 2003, d’ouvrir, pour la première fois depuis l’indépendance du pays, le secteur audiovisuel aux initiatives privées, a laissé indifférents de nombreux Tunisiens.

L’Association des journalistes tunisiens (AJT), contrôlée par l’ةtat, notait elle-même, dans son rapport sur l’état de la presse en 2003, le manque de transparence qui a caractérisé la décision de privilégier Radio Mosaïque comme première station privée.

« Cette station a été retenue en l’absence de directives générales pour tous les candidats désirant ouvrir une station de radio privée », affirme l’AJT dans son rapport, qui fut distribué surtout à l’extérieur de la Tunisie.

La Ligue tunisienne des droits de l’Homme soutient que les autorités tunisiennes ont ignoré l’article 20 du Code des communications, qui stipule que les invitations à présenter des soumissions doivent être portées à l’attention du public par le biais de la presse.

La LTDH, dont le rapport intitulé « Médias sous surveillance » a été préparé par un groupe de journalistes indépendants et un spécialiste des médias, décrit Nour Eddine Boutar, le propriétaire de Radio Mosaïque, comme un « ex-journaliste du quotidien Eshouroug, s’étant distingué par une allégeance absolue et pleine de zèle au régime en place ».

Radio Mosaïque diffuse quatre courts bulletins par jour, de même que les discours complets du Président Ben Ali, après consultation de l’agence officielle de nouvelles Tunisie Afrique Presse (TAP). En octobre 2004, au cours de la campagne électorale, la station manifesta une préférence pour le Président Ben Ali, au détriment de ses opposants. Seules les informations qui faisaient la promotion de Ben Ali et de son parti étaient diffusées sur les ondes.

ہ la mi-février 2005, l’annonce que la première station de TV privée, Hannibal TV, amorcerait bientôt des essais de diffusion, souleva encore plus d’inquiétudes au sujet de l’absence de transparence relative à la privatisation graduelle du diffuseur télévisuel. Comme dans le cas de Radio Mosaïque, les Tunisiens furent encore une fois laissés dans l’ignorance des lignes directrices et des critères adoptés par le gouvernement pour privilégier Larbi Nasra, l’apparent propriétaire de Hannibal TV, au détriment des autres candidats potentiels.

ہ la différence de Boutar, Nasra n’est pas connu des journalistes et des militants de la société civile. Dans une entrevue qu’il a accorde, le 20 avril 2004, à l’hebdomadaire privé Al Hadath (L’ةvénement), considéré comme proche du ministère de l’Intérieur, il affirmait qu’environ 30 % des programmes diffusés par Hannibal TV « seraient consacrés à des thèmes sociaux et aux questions concernant les femmes ». Il ajoutait : « le reste de la programmation comprendra, au départ, des divertissements, des sports et des émissions à caractère culturel ».

Au moins six Tunisiens, y compris Zyed El Héni, collaborant au journal As-Sahafa du groupe « La Presse », propriété de l’ةtat, et Rachid Khéchana, correspondant à Tunis de Al-Hayat et rédacteur en chef de El Maoukif, organe hebdomadaire de du Parti démocratique progressiste (opposition), ont présenté des demandes pour ouvrir de nouvelles stations radio privées. En mars 2005, Khechana présenta également une demande visant a ouvrir une station de télévision privée. Pas une seule de ces requêtes n’a reçu de réponse, aucune raison n’étant fournie pour expliquer l’absence de décision.

Bien que les citoyens tunisiens soient tenus par la loi de payer des redevances à l’ةtablissement de la Radio et Télévision tunisienne - par le biais des factures de gaz et d’électricité -, ils n’ont aucune influence sur les médias, qui sont contrôlés par l’ةtat. Les Tunisiens regardent plus souvent les chaînes de télévision arabes transmettant par satellite que la chaîne de télévision 7 (pour les adultes) et la chaîne 21. (s’adressant aux jeunes) La radio nationale, avec son programme international en langues étrangères et ses cinq stations régionales, manque de qualité et de crédibilité.

En février et mars 2004, l’opposition et des groupes de la société civile sont descendus dans la rue pour protester contre le contrôle exercé par l’ةtat sur la radio publique et les stations de télévision et pour affirmer leur droit à la liberté d’expression.

7. La censure de la presse et le manque de diversité de la couverture journalistique

Le Président Ben Ali a publiquement accusé les journalistes tunisiens de pratiquer l’autocensure. Pourtant, ses collaborateurs continuent d’accentuer la pression sur les médias, de réduire au silence, par différents moyens, les journalistes indépendants et de harceler les correspondants étrangers. En mai 2000, près de trois semaines après avoir fait appel aux journalistes, leur demandant de prendre leur courage à deux mains pour se libérer des chaînes de l’auto-censure, Riadh Ben Fadhel, un homme d’affaires qui fut autrefois responsable de l’édition arabe du mensuel français Le Monde Diplomatique, fut atteint de coups de feu et blessé sérieusement par des tireurs inconnus. Des organisations internationales de défense des droits humains considèrent que l’agression, qui a eu lieu en face de la demeure de Ben Fadhel, à proximité du Palais présidentiel de Carthage, « avait toutes les apparences d’une tentative d’exécution extrajudiciaire ». L’agression a eu lieu à la suite de la publication par le journal Le Monde d’un article d’opinion dans laquelle Ben Fadhel critiquait le gouvernement. Jusqu’à présent, cette tentative d’assassinat n’a reçu aucun éclaircissement, ce qui a eu pour effet de refroidir les ardeurs des journalistes indépendants et des défenseurs des droits humains.

Au cours de l’histoire récente de la Tunisie, nombre de journalistes, collaborant aux médias qui appartiennent à l’ةtat et subissant la pression des autorités qui cherchent à les transformer en simples outils de propagande, ont dénoncé la censure excessive à laquelle ils sont soumis. Dans les années 80, ils jouèrent un rôle clé en transformant l’Association des journalistes tunisiens en l’une des associations les plus indépendantes de la région.

Le 9 mars 2004, un groupe de journalistes travaillant pour deux quotidiens appartenant à l’ةtat, La Presse et Essahafa, prirent tout le monde par surprise. Dans une lettre envoyée aux responsables du gouvernement, y compris le Premier Ministre Mohamed Ghannouchi, de même qu’à des groupes faisant partie de la société civile, ils notaient « un retour en force de la politique de la censure et de la pression exercée sur leurs écrits ».

Dans leur lettre, dont une copie fut envoyée à la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, qui la cite dans son rapport « Médias sous surveillance », ils dénoncent certaines pratiques courantes de censure par leurs éditeurs, comme « la distorsion des articles et la déformation de leur contenu ». Ces derniers reconnaissent qu’ils se conforment aux directives reçues de la part de hauts responsables, mais ils refusent de préciser qui se trouve à la source de ces initiatives.

Ils ajoutent : « les choses ont pris une telle tournure que certains articles d’analyse politique et certains commentaires sont censurés, le directeur général de La Presse affirmant constamment qu’un journaliste ou une journaliste n’a plus le contrôle de son article une fois qu’il ou elle l’a soumis aux responsables de la rédaction du journal ».

Selon les auteurs de la lettre, « au cours des derniers mois », la censure a gagné tellement de terrain qu’elle a une incidence sur toutes les questions et tous les événements, y compris ceux qu’on leur demande de couvrir. En 2004, les responsables de la rédaction ont reçu pour instruction de ne publier que la version officielle des événements, y compris lorsqu’il s’agit de la couverture de désastres comme les inondations qui ont frappé sévèrement le pays, l’apparition d’une maladie transmise par les moustiques, et la décision controversée du Président Ben Ali de reporter le Sommet de la Ligue arabe, qui devait se tenir à Tunis.

Les directives données aux responsables de la rédaction des journaux appartenant à l’ةtat, ainsi qu’a ceux des journaux privés, pour qu’ils ferment les yeux sur les cas de torture policière sur les personnes détenues provisoirement et les grèves de la faim des prisonniers politiques et autres militants, sont incessantes. En décembre 2004, deux quotidiens privés ont refusé de publier un encart payé par la section tunisienne d’Amnesty International, qui rendait hommage à la mémoire de Ahmed Othamani, ancien prisonnier politique et premier Arabe à avoir joué un rôle de premier plan au sein du Secrétariat international d’AI à Londres. Qu’ils disposent ou non d’une reconnaissance légale, les groupes tunisiens de défense des droits de l’Homme et leurs activités sont encore inscrits sur la liste noire du pouvoir.

D’après l’Agence tunisienne de communication extérieure, « 90 % des journaux appartiennent à des intérêts privés et sont indépendants du point de vue de la rédaction ». Pourtant, au cours des quinze dernières années, les journaux propriété de l’ةtat, tout autant que les journaux privés, ont rivalisé dans leur zèle à louanger les politiques du Président Ben Ali et à critiquer ses opposants.

Tous les journaux, notamment ceux qui appartiennent au secteur privé sont tenus en laisse par l’Agence tunisienne de communication extérieure (ATCE), qui contrôle le placement des annonces publicitaires dans les secteurs publics et semi privés. Certaines petites formations de l’opposition, qui appuient les politiques du président Ben Ali, se sont vues octroyer des sièges à la Chambre des députés. Elles peuvent également recevoir de la part de l’ATCE des allocations qui couvrent leurs dépenses en matière de médias. Le Parti démocratique progressiste, qui publie l’hebdomadaire Al-Maoukif (La Position), ne jouit pas d’un traitement aussi généreux que les cinq autres partis représentés, en raison, principalement, de son attitude critique vis-à-vis du gouvernement.

Al-Maoukif et Attarik El-Jédid doivent souvent attendre plus de 24 heures à l’imprimerie, avant d’obtenir du ministère de l’Intérieur l’autorisation de distribuer, attitude qui reflète le mécontentement de l’ةtat à leur endroit.

Selon la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, « la censure et la désinformation n’ont pas épargné les hauts responsables étrangers ». Ainsi, lorsque les médias tunisiens ont attribué faussement des remarques au Secrétaire d’ةtat Colin Powell, en visite en Tunisie, l’American Information Centre à Tunis a réagi en publiant la version complète de ses propos. En fait, Monsieur Powell n’a jamais mentionné les « progrès remarquables dans le domaine des droits de l’Homme », mais il a simplement évoqué les « progrès réalisés dans le domaines des droits de la femme et de l’éducation ».

Le gouvernement tunisien persiste également à bloquer la distribution des journaux et magazines étrangers. Il retarde également la distribution de certains d’entre eux, parfois pendant plusieurs jours. Pour éviter ces obstacles récurrents et les interdictions, Al-Hayat, installé à Londres, a décidé de boycotter l’épineux marché tunisien.

Les journaux tunisiens sont également conviés à s’appuyer fortement sur Tunisie Afrique Presse (TAP), agence de presse appartenant à l’ةtat, surtout en ce qui a trait aux nouvelles locales et aux activités du président Ben Ali (lequel occupe la première page des journaux). Le gouvernement tunisien finance régulièrement, dans différents journaux, notamment au Moyen-Orient, des articles flatteurs sur le président Ben Ali, qui vantent ses « réalisations remarquables dans les domaines de l’éducation, de la croissance économique, des libertés et de l’émancipation des femmes ». Ces articles ne se présentent pas comme des publicités, mais comme des nouvelles, qui seront ensuite reprises par les quotidiens tunisiens, puis longuement citées par les stations de radio et par la télévision d’ةtat.

Il y avait plus de diversité dans le monde de la presse écrite avant que le président Ben Ali n’accède au pouvoir en 1987. L’un après l’autre, trois journaux indépendants furent réduits au silence : en 1987, Errai (L’Opinion), puis, au début des années 90, le Phare et le Maghreb. Le directeur du Maghreb, Omar S’habou, fut emprisonné pendant un an, après un procès dont les motivations étaient politiques. Après sa libération, il se réfugia en France. Deux journaux d’opposition, l’hebdomadaire islamiste Al-Fajr (L’Aube) et l’hebdomadaire gauchiste Al-Badil (L’Alternative) ont également été réduits au silence en 1991. Leurs éditeurs, Hamadi Jebali et Hamma Hammami, furent emprisonnés à la suite d’un procès aux connotations politiques. Outrouhat (Thèse) et 15-21, deux périodiques politiques, ont également disparu des kiosques à la fin des années 80.

La répression sans précédent de l’opposition, des groupes de défense des droits de l’Homme et des journalistes indépendants qui a eu lieu au début des années 90 a conduit plusieurs journalistes à quitter le pays. Les nombreuses requêtes en vue de publier des journaux ou des magazines continuent d’être ignorées par le ministère de l’Intérieur. En fait, elles ne sont pas toutes retracées par les groupes tunisiens de défense des droits de l’homme. D’après la LTDH, la liste de ceux qui ont déposé une demande est la suivante :

NOM DU JOURNAL/MAGAZINE REQUةRANT Maqassed (Objectifs) Mohamed Talbi Kalima (Mot) Sihem Ben Sedrine Alternatives Citoyennes Nadia Omrane La Maghrébine Nora Borsali El Adib (Le littéraire) Abdellatif Fourati

La recherche sur la surveillance de la couverture des élections tunisiennes d’octobre 2004, menée par trois groupes tunisiens de défense des droits de l’homme, en collaboration avec l’International Media Support, basé à Copenhague, a confirmé qu’il n’y a toujours que très peu de place pour le pluralisme dans les médias tunisiens. Les groupes tunisiens ayant pris part à cette recherche sont la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD) et le Conseil national pour la liberté en Tunisie (CNLT).

« Les médias sont pour la plupart au service du parti au pouvoir, aux dépens de la démocratie et de l’intérêt général. En fin de compte, l’échec des médias est celui du système politique tunisien dans son ensemble, qui manque de se conformer aux normes internationales dans ce domaine », ont conclu les chercheurs tunisiens et internationaux.

8. Les services de sécurité recourent à la torture en toute impunité

Bien que le gouvernement tunisien répète à qui veut l’entendre que « la torture est interdite » et que la Tunisie « a librement ratifié toutes les ententes internationales qui interdisent la torture », les groupes locaux de défense des droits de l’Homme rapportent des centaine de cas de torture au cours des dernières années, notamment lors des gardes à vue.

Selon le code pénal, la torture est un crime passible d’une peine de huit ans d’emprisonnement. Pourtant, les détenus tunisiens, y compris les militants des droits civils, sont continuellement torturés par les forces de sécurité et subissent des traitements dégradants.

Parmi les centaines de cas de torture qui se sont produits au cours de la dernière décennie, une quinzaine seulement a fait l’objet d’une enquête. Le Comité contre la torture, qui surveille les adhésions à la Convention internationale contre la torture, a exprimé son inquiétude au sujet de « la pression et de l’intimidation qu’exercent les responsables pour empêcher les victimes de porter plainte ».

Au cours des quinze dernières années, de nombreux militants politiques sont morts sous la torture, ou par manque de soin médicaux, alors qu’ils étaient placés en garde à vue ou détenus. Plusieurs anciens prisonniers politiques de différentes tendances, y compris des islamistes et des gauchistes torturés avant et après l’accession au pouvoir du Président Ben Ali, ont affirmé que les séances de torture étaient devenues plus cruelles après l’éviction du président Bourguiba en 1987.

Le 14 janvier 2005, la Ligue tunisienne des droits de l’Homme rapportait le décès de Lotfi Hidouri - qui fut une figure de proue de l’Union générale des étudiants tunisiens (islamistes) et de la prison politique - des suites d’un « manque de soins médicaux ».

Les membres du groupe de l’IFEX ont rencontré plusieurs victimes de tortures policières chez les individus placés en garde à vue ou détenus en prison, notamment : Zouhair Yahyaoui, Abdallah Zouari, Fathi Chamkhi et Sahnoun Jouhri, de même que les avocats dont les clients, y compris les militants des droits civils, ont été torturés. Ils ont également rencontré les parents des jeunes internautes de Zarzis ainsi que leurs avocats, qui ont affirmé que les enfants avaient été torturés et contraints sous la menace de signer des déclarations assermentées. Ils ont ajouté que les enfants étaient en mauvaise santé et emprisonnés dans des conditions épouvantables.

Zouhair Yahyaoui a rapporté qu’il avait été battu alors qu’il était suspendu au plafond par les mains, maltraité et laissé sans soins médicaux. Le juge qui l’avait condamné pour avoir « diffusé de fausses nouvelles » et « fait un mauvais usage des lignes de télécommunications » a rejeté l’appel de son avocat pour ouvrir une enquête sur les allégations de torture.

Radhia Nasraoui, l’une des avocates de la défense des droits de l’Homme les plus en vue, qui est également directrice de l’Association de lutte contre la torture en Tunisie (organisation interdite), a rapporté qu’un des membres de son groupe fut attaché au plafond par les pieds, puis plongé a plusieurs reprises dans un bassin d’eau bouillante par ses tortionnaires. « Ils l’ont torturé jusqu’à ce qu’il se mette à vomir du sang », a-t-elle dit.

D’après Nasraoui, « dans toutes les postes de police, la torture est une pratique quotidienne. Au cours des dernières années, des centaine de prisonniers politiques ont été torturés, mais il y en a également d’autres, qui n’ont rien à voir avec la politique ». Cette opinion est partagée par de nombreux autres avocats qui travaillent à la défense des droits de l’Homme, ainsi que par les organisations internationales des droits de l’Homme.

Nasraoui a entrepris plusieurs grèves de la faim pour protester contre les atteintes à sa liberté de mouvement et d’expression, et pour protester contre le harcèlement de ses clients, de ses enfants et de son mari et militant politique Hamma Hammami. On lui a souvent retiré le droit de visiter ses clients en prison en raison de sa détermination inébranlable à informer l’opinion publique au sujet des violations flagrantes des droits de l’homme.

Nasraoui s’interroge : « Pourquoi le SMSI se tiendrait-il dans un pays où les gens peuvent mourir pour avoir exprimé une opinion et où les journaux et les magazines indépendants sont interdits, ou, s’ils ne le sont pas, doivent faire très attention à ce qu’ils disent ? »

Elle affirme que les militants qui, comme elle, se voient refuser la liberté d’expression et d’association « n’ont d’autre choix que de profiter du SMSI pour poser cette question à ceux qui participeront au Sommet ».

CONCLUSION

Il y a quarante-neuf ans, la Tunisie accordait aux femmes des droits qui étaient sans équivalent dans le monde arabe. Elle faisait également des progrès dans le combat contre l’analphabétisme, la pauvreté et les préjugés. En dépit du gouvernement autocratique du Président Bourguiba, la société civile tunisienne et notamment la presse, qui a joué un rôle important dans l’accession de la Tunisie à l’indépendance par rapport à la France, en 1956, était un des pays les plus dynamiques d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, jusqu’à ce que le Président Ben Ali s’empare du pouvoir en 1987. La Ligue tunisienne des droits de l’Homme, la première du genre en Afrique et dans le monde arabe, fut fondée en 1977.

Après avoir évincé son prédécesseur autocratique et charismatique, le président Ben Ali avait promis de conduire le pays à la démocratie. Dix-huit ans plus tard, les Tunisiens de toutes tendances, y compris les défenseurs des droits de l’Homme, les islamistes, les gauchistes et les anciens ministres, soutiennent tous que la société civile n’a jamais été aussi rigide et que les journalistes n’ont jamais été aussi muselés depuis l’indépendance de la Tunisie.

Le gouvernement a utilisé comme prétexte l’apparition de la violence en Algérie qui a suivi l’annulation du résultat des élections de 1992, et plus tard, l’attaque terroriste du 11 septembre 2001contre les ةtats-Unis, pour opprimer les dissidents politiques et les journalistes indépendants. Le nombre de militants politiques morts sous la torture ou à la suite d’un manque de soins médicaux, le nombre de livres interdits et de journaux indépendants réduits au silence au cours des dernières années est sans précédent dans l’histoire du pays.

Aujourd’hui, les médias tunisiens, l’Internet et le secteur de l’imprimerie sont régis par des lois qui enfreignent l’article 19 de la Constitution du pays : ils sont sous le contrôle du ministère de l’Intérieur, qui décide ce que les Tunisiens peuvent voir, lire et dire en toute sécurité.

Les progrès relatifs en matière de développement économique et social, qui ont été rendus possibles par des décisions politiques courageuses prises il y a près de cinquante ans, afin de permettre aux femmes de jouir de droits égaux et favoriser l’émergence d’une importante classe moyenne, sont utilisés comme paravent par le gouvernement pour se prémunir contre la critique de sa piètre performance dans le domaine des droits de l’Homme.

L’investissement massif du gouvernement tunisien dans une campagne de relations publiques, dirigée principalement vers les capitales occidentales, lui a permis, pendant plusieurs années, de faire accepter comme allant de soi sa rhétorique sur la démocratie. La décision de tenir la seconde phase du SMSI à Tunis en novembre 2005a surpris de nombreux défenseurs tunisiens des droits de l’Homme et de la démocratie, de même que les groupes nationaux, régionaux et internationaux travaillant pour assurer la liberté d’expression à travers le monde.

Le succès de la seconde phase du SMSI dépendra grandement de la capacité de la communauté internationale à entamer des démarches en vue d’assurer le respect de la liberté d’expression en Tunisie. Des changements de façade, qui ont la faveur du gouvernement de Tunisie et qui sont devenus sa spécialité, ne sont plus acceptables.

RECOMMANDATIONS

Le groupe de l’IFEX chargé de l’observation de l’état de la liberté d’expression en Tunisie incite fortement les autorités tunisiennes à :

libérer Hamadi Jebali, éditeur de l’hebdomadaire Al-Fajr, ainsi que les centaines de prisonniers qui, comme lui, sont détenus pour leurs croyances religieuses ou leurs convictions politiques sans avoir jamais prôné la violence ou y avoir eu recours ; lever les sanctions administratives qui contraignent le journaliste Abdellah Zouari à vivre à 500 km de sa femme et de ses enfants, et lui rendre sa liberté de mouvement et d’expression ; libérer les sept cyberdissidents connus sous le nom de « jeunes internautes de Zarzis », qui ont été condamnés, à la suite de procès injustes, à de lourdes peines de prison pour avoir, soi-disant, utilisé Internet à des fins terroristes. Selon leurs avocats et les groupes locaux et internationaux de défense des droits de l’Homme, aucune preuve d’agissements répréhensibles n’a été fournie au cours de ces procès ; cesser le harcèlement et les agressions perpétrées a l’encontre des militants politiques et des défenseurs des droits de l’Homme, et traduire en justice ceux qui sont responsables de ces actes et de ces attaques ; cesser de bloquer les sites web et de placer les cafés Internet sous surveillance policière, en violation de l’article 19 du Pacte international sur les droits civils et politiques (ICCPR) ; remettre en libre circulation les livres interdits, mettre fin à la censure et se conformer aux normes internationales en matière de liberté d’expression, d’association, de réunion et de procès équitables ; veiller à ce que cessent les intrusions continues de membres du gouvernement dans les affaires privées des citoyens, de même que les rétentions de courrier ; respecter la Déclaration du droit et de la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales universellement reconnus, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies, le 9 décembre 1998 ; lever l’interdiction de voyager qui pèse sur les défenseurs des droits de l’Homme et les militants politiques, notamment Mokhtar Yahyaoui et Mohamed Nouri, et leur rendre leurs passeports ; prendre des mesures efficaces pour lever toutes les restrictions qui pèsent sur le journalisme indépendant et sur le pluralisme authentique dans la propriété des stations de radiodiffusion et de télédiffusion ; autoriser des enquêtes indépendantes dans les cas de torture perpétrés par les forces de sécurité, souvent dans les locaux du ministère de l’Intérieur. accorder une reconnaissance légale aux regroupements authentiques de membres de la société civile, comme le CNLT, le Centre de Tunis pour l’indépendance de la justice, la Ligue des écrivains libres, l’OLPEC, l’Association internationale de soutien aux prisonniers politiques (AISPP), RAID - ATTAC Tunisie, etc.

ANNEXE 1

Lettre ouverte

Son excellence M. Kofi Annan Secrétaire général des Nations Unies Organisation des Nations Unies New York, NY10017 - USA

cc. M. Yoshio Utsumi, Secrétaire général, ITU M. Koichiro Matsuura, Directeur général, UNESCO

Baku, le 18 juin, 2004

Cher Monsieur

Nous, représentants des organisation de défense de la liberté d’expression, réunis lors de l’Assemblée générale de "International Freedom of Expression Exchange" (IFEX) à Baku, Azerbaijan le 8 Juin, 2004, nous vous écrivons afin de vous exprimer notre profonde et croissante préoccupation concernant le choix de Tunis pour la tenue du Sommet des Nations Unies sur la Société de l’information en 2005.

Lors de la fermeture de la première phase du Sommet Mondial sur la Société de l’Information (SMSI), le sommet intergouvernemental à Genève a adopté une Déclaration de principes qui plaçait les droits humains et la liberté d’expression au centre et comme principes fondamentaux de la Société de l’Information.

Cependant, le gouvernement tunisien continue de violer ses engagements inscrits dans la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits humains et, la Convention international sur les droits civils et politiques. Les medias de communication restent sous le contrôle de l’ةtat, les sites Internet sont bloqués et les journaux qui critiquent le gouvernement sont interdits de publication, la censure de l’Internet se pratique de façon quotidienne et la Tunisie continue de renvoyer ses citoyens en prison lorsqu’ils exercent leur liberté d’expression.

Nous demandons aux Nations Unies et aux ةtats membres de changer le siège du SMSI si le gouvernement de la Tunisie ne fait pas des progrès en matière de droits humains et de liberté d’expression. Nous considérons que les éléments suivants sont des conditions nécessaires et suffisantes pour la tenure du sommet en Tunisie :

La reconnaissance et le respect pour les droits inaliénables des groupes de droits humains et de la société civile, y compris le droit des organisations oeuvrant pour la liberté d’expression, d’opérer librement en Tunisie.

Abandonner les accusations et libérer les individus emprisonnés pour avoir exercé leur droit à la libre expression de manière consistante avec le droit international.

La réforme de l’environnement dans lequel oeuvrent les médias et les communications y compris le droit à mettre sur pied des médias de communication et d’accéder à l’Internet sans souffrir la censure.

De plus, nous demandons des garanties claires sur le déroulement du Sommet lui-même :

Que les organisation locales et internationales de droits humains et les autres organisations de la société civile aient la liberté de participer au Sommet, de publier, de diffuser, de distribuer et de recevoir des matériels à la Conférence sans recevoir des menaces ou souffrir d’une quelconque forme de censure.

Que les medias de communications locaux et internationaux puissent informer librement et sans interférence sur le Sommet, y compris, du site de la Conférence.

Nous faisons un appel aux Nations Unies et aux ةtats membres d’insister auprès du gouvernement tunisien afin qu’il accepte de respecter ces garanties concernant le Sommet ainsi qu’il prenne l’engagement de montrer des progrès substantiels et mesurables en relation aux conditions indiquées ci-dessus.

Dans le cas ou le gouvernement tunisien ne serait pas disposé à prendre ces engagements, nous invitons le Secrétaire général des Nations Unies a recommander a l’Assemblée générale de reconsidérer la tenue du Sommet mondial de la société de l’information en Tunisie.

Sincèrement,

ARTICLE 19 Canadian Journalists for Free Expression (CJFE) Cartoonists Rights Network, International (CRN) Center for Human Rights and Democratic Studies (CEHURDES) Central Asian and Southern Caucasus Freedom of Expression Network (CASCFEN) Centre for Journalism in Extreme Situations (CJES) Centro de Reportes Informativos sobre Guatemala (CERIGUA) Committee to Protect Journalists (CPJ) Fundaciَn para la Libertad de Prensa (Foundation for Press Freedom) Freedom House Freedom of Expression Institute (FXI) Independent Journalism Centre (IJC), Moldova Index on Censorship International Federation of Journalists (IFJ) Journaliste en danger (Journalist in Danger, JED) Media Foundation for West Africa (MFWA) Media Institute of Southern Africa (MISA) Media Rights Agenda Norwegian PEN PERIODISTAS, la Asociaciَn para la Defensa del Periodismo Independiente Southeast Asian Press Alliance (SEAPA) Thai Journalists Association (TJA) World Association of Community Radio Broadcasters (AMARC) World Association of Newspapers (WAN) World Press Freedom Committee (WPFC)

ANNEXE 2

Liste des sites Web bloqués qui présentent des nouvelles, des informations politiques et des informations sur la Tunisie, et qui étaient bloqués en date du 16 janvier 2005.

http://www.rezoweb.com/forum/politi...
- Un forum de discussion alternatif sur la politique tunisienne

http://www.rsf.fr/ et http://www.rsf.org
- Le site Web des défenseurs internationaux de la liberté d’expression, Reporters Sans Frontières

http://www.tunezine.com/
- Informations sur la Tunisie et commentaires ; l’éditeur a été emprisonné

http://www.nahdha.net/
- Le site Web du mouvement islamiste interdit An-Nahdha

http://www.tunisnews.net/
- Un site de nouvelles politiques de l’opposition tunisienne

http://www.maghreb-ddh.org/
- Un site de nouvelles politiques de l’opposition tunisienne

http://www.albadil.org/
- Le journal en ligne du Parti communiste des travailleurs tunisiens, interdit

http://www.alternatives-citoyennes....
- Un site tunisien de nouvelles et d’informations alternatives

http://www.tunisie2004.net/
- Site de l’opposition tunisienne, consacré aux nouvelles et à la politique, et lié au CPR (un parti politique non reconnu)

http://www.cprtunisie.com/
- Le site « officiel » du CPR tunisien (Congrès pour la République, non reconnu)

http://tounes.naros.info/
- Site tunisien d’opposition politique, lié à l’Initiative Démocratique indépendante

http://www.globalprevention.com/mar...
- Le site Web du défenseur tunisien des droits de la personne en exil, Moncef Marzouki

http://www.nawaat.org/
- Un site de nouvelles politiques de l’opposition tunisienne

http://www.perspectivestunisiennes.net/
- Un site de nouvelles politiques de l’opposition tunisienne

http://www.verite-action.org/
- Le site d’une ONG suisse qui fait campagne en faveur du respect des droits de la personne en Tunisie

http://www.maghreb-ddh.sgdg.org/www/
- Un site de nouvelles politiques de l’opposition tunisienne

http://www.multimania.com/solidarite26
- Un site consacré à la solidarité avec les prisonniers politiques tunisiens

http://www.reveiltunisien.org/
- Un site de nouvelles de l’opposition tunisienne ; satire politique

http://www.kalimatunisie.com/
- « Le mot », nouvelles politiques tunisiennes indépendantes

ANNEXE 3

Liste des ouvrages censurés en Tunisie en date de janvier 2005. ةtabli par la Ligue des écrivains libres.

Abdel Rahmane Abid, « De l’orientation démocratique et de la réconciliation nationale », ةtude politique, Tunis, 1989 (en arabe) ;

Ibrahim Darghouthi, « Le pain amer », nouvelles en arabe, Dar Samed, 1990 ;

Abdel Jabbar Al Ich, « Poèmes pour l’Irak », coédition Dar Samed (Tunisia) et Dar al Hikme (Algérie), 1991 ;

Fadhel Sassi (Martyre des « événements du pain » de janvier 1984), « Mon destin est de partir », poèmes et histoires choisies par Sabah Sassi et Jelloul Azzouna, ةdition journal Al-Cha’ab, 1994 ;

Tawkik al Bachrouch, « Notre femme à travers nos fetwas », (cent fetwas sur mille ans),

Mohamed el Hédi Ben Sabach, « Le retour de Azza, l’émigrée », roman de 235 pages, ةditions Bouzid, 1994 ; Mohamed Al Chabbi, « Un témoin a dit », poèmes, ةditions Al Akhilla, 1999 ;

Sadok Charaf, « La grand catastrophe, ô ma patrie », poème, Al Akhilla, 1990 ;

Mohamed Falbi, « Les enfants d’Allah » ;

« Le musulman à travers l’histoire », recherche collective, Faculté des Lettres, La Manouba ;

Afif Al Bouni, « De la stabilité politique en Tunisie », 1997 ;

Tawfik Ben Brik, « Maintenant, écoute-moi », poèmes, Exils et Aloès ةditions, 2000 ;

Tawfik Ben Brik, « Ben Brik au Palais », Maison Al Kaws - Al Nahar (Tunis-Beirut coédition), 2000 ; Mohamed Ammar Khawaldya, « Le discours utile sur le nouveau régime », ةdition à compte d’auteur, 2001 ;

Ali Azizi « Les ailes du silence », roman, 2001 ;

Moncef Marzouki. Ses livres, publiés à Tunis, sont retirés des librairies. Il a dû publier son roman (« Le voyage ») en France et en Syrie en 2002. 3 volumes. (Eurabe - Al Ahali, 206 pages x 3) ;

Hamma Hammami. Au moins dix exemplaires de son livre, imprimé et diffusé à Tunis, ont été retirés des librairies et des bibliothèques publiques dépendant du ministère de la Culture. Il a dû publier son dernier livre en France.

Jelloul Azzouna, « Liberté et littérature, même identité » (études et articles), Dar Sahar, 232 pages, 2002 ;

Abdelwahab al Mansouri, « Rien ne me plaît », Poèmes, 2003 ;

Samir Ta’mallah, « Dits en marge de l’interrogatoire », poèmes ;

Jalel al Touibi, « Militant malgré lui », roman, 123 pages, 1995 (2e édition, 2004, 176 pages).



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